Ceci est un (re)copier>>(re)coller de l'article de A. J. Holbeck publié sur le site http://www.onnouscachetout.com
Il s'agit d'un exposé didactique sur l'économie, et la véritable identité de l'argent. Régalez-vous!

[Débat] Un autre regard sur l'économie : sortir de la pensée unique



1. La Dame de Condé

Nous sommes à Condé-sur-Gartempe. Son hôtel de la Gare est réputé pour ses ortolans et sa discrétion...! Un vendredi après-midi débarque une jeune femme, d’apparence comvenable, bien qu’un peu trop fardée.
Elle réserve une chambre pour la nuit et, comme elle n’a pas de bagage, elle laisse en acompte un billet de 100 euros, tout neuf. Puis elle s’en va visiter la vieille ville.
Le pâtissier qui a vu la scène dit au patron: « ça fait six semaines que vous me devez 100 euros pour la pièce montée que j’ai livrée à l’occasion de la communion de votre fille. » Le patron lui donne le billet de bonne grâce.
Comme cette scène a été vue par d’autres, elle se reproduit cinq nouvelles fois, car le pâtissier devait aussi 100 euros au minotier... qui en devait autant au garagiste... lui-même débiteur de cette somme au boucher... qui avait à régler 100 euros au représentant de la maison Erlida... lequel devait à son tour acquitter sa chambre à l’hôtel de la Gare pour 100 euros.
Il redonne donc le billet au patron de l’hôtel.
Notre Dame revient de promenade. Elle annonce, qu’ayant fait une rencontre, elle annule sa réservation. Ce qui arrange bien l’hôtelier qui, entre temps, a eu une demande d’un de ses vieux clients. L’hôtelier lui rend donc son billet qu’elle brûle aussitôt.
« Il était faux », dit-elle en souriant.

Moralité de cette histoire

- Pourquoi un faux billet a-t-il été capable de catalyser autant d’échanges?
Parce qu’un billet est de la monnaie fiduciaire (du latin fiducia: confiance). C’est exclusivement une « valeur de confiance » entre les membres d’une communauté. Dans un autre pays il n’aurait pas été accepté. Un billet faux perd « sa valeur » seulement au moment où il se révèle faux et n’est plus accepté par celui qui le reçoit. C’est celui qui le détient en dernier qui assume la perte. Dans cette histoire il n’y a pas eu de perte sauf pour la Dame de Condé qui savait de toute façon qu’il était faux.

- Serait-ce qu’il y a carence de pouvoir d’achat dans notre société?
En effet la Dame de Condé, en réservant sa chambre, a accru de 100 euros la masse monétaire du village, ce qui a permis à six personne d’éteindre réciproquement leur dette pour un montant total de 600 euros La « qualité » de la monnaie utilisée, bonne ou mauvaise, est indifférente

(origine "Aise" - paru dans "Un regard citoyen sur l'économie", édition Yves Michel )



2. Le comté de Roseland

Ceci se passait en des temps fort anciens :
Dans le comté de Roseland vivait une population industrieuse. La prospérité et la convivialité régnaient.

Nicolas, le cinquième fils d’un fermier, venait d’atteindre sa majorité. Il vint trouver son père et lui dit : « Père, la ferme n’a pas besoin d’une cinquième paire de bras pour continuer à prospérer. Or, on entend bien des habitants du comté regretter l’absence d’habits de fête. Aussi souhaiterais-je m’établir tisserand. »

« Bonne idée », répondit son père. « Je peux te donner la petite grange pour y installer ton échoppe. Mais tu sais que je n’ai pas trop d’argent et il t’en faudra pas mal. Va donc voir, de ma part, le Grand Argentier du comté. »

Ce qui fut dit, fut fait. Nicolas fut tout étonné, lors de son entrevue, de voir le Grand Argentier si ouvert et les choses si faciles. « Il te faut 250 écus ? Les voici. Bon courage, Nicolas !... »
Nicolas se confondit en remerciements ; mais dans le couloir, il fut pris d’un doute : « Il ne m’a fixé, ni échéance de remboursement, ni taux d’intérêt ». Il revint donc frapper à la porte pour demander les conditions de ce prêt. « Nous ne te prêtons pas ces écus, nous te les donnons. L’équilibre de la circulation monétaire est actuellement atteint dans notre Comté. Il faudra donc un peu plus de pouvoir d’achat à nos sujets pour acheter tes beaux habits. L’argent que nous te donnons pour acheter tes laines, tes teintures, mais aussi pour que tu puisses créer une famille, va aller dans leurs poches par tes achats. Tu serviras la collectivité et l’équilibre subsistera. »

Moralité de cette histoire

1) La masse monétaire doit rester liée aux évolutions du progrès technique, à la production, et à celles de la population d’une nation. Si la population s’accroît ou si les activités augmentent, la masse monétaire en circulation doit s’accroître aussi, ce n’est pas de l’inflation.

2) La monnaie est la propriété de la communauté. Elle est émise par son représentant mandaté. Elle ne coûte que le prix du papier et des salaires pour la fabriquer ou pour l'écrire sur un ordinateur. Mais aujourd’hui l’État ayant abdiqué son pouvoir régalien de battre la monnaie, l’accroissement nécessaire de la masse monétaire est financé par l’emprunt (conséquence de la demande de crédit des agents économiques publics et privés) et coûte des intérêts exorbitants. L’argent est créé sous forme de dettes et il est devenu propriété des banques et non plus de la communauté. Le peuple a perdu sa souveraineté.

3) Que se serait-il passé pour Nicolas, si l’argent, au lieu de lui avoir été sagement donné, lui avait été prêté, et de plus avec intérêt ? En dépensant les 250 écus prêtés, il aurait bien accru la masse monétaire de la communauté. Mais en les remboursant, c’est-à-dire en s’en privant, il aurait cette fois diminué la masse monétaire qui serait revenue à son niveau initial. Finalement sa nouvelle activité, au lieu d’enrichir la communauté, l’aurait appauvrie.

(origine "Aise" - paru dans "Un regard citoyen sur l'économie", édition Yves Michel )



3. Sauvés du naufrage

Une explosion a détruit leur bateau. Cinq ont fini par se trouver réunis sur cette épave. Tout à coup, un cri a retenti: Terre! Terre là-bas, voyez ! Justement dans la direction où nous poussent les vagues!

Et à mesure que se dessine, en effet, la ligne d'un rivage, les figures s'épanouissent.
Ils sont cinq:
- François, charpentier
- Paul, cultivateur;
- Jacques, spécialisé dans l'élevage des animaux
- Henri, agronome horticulteur;
- Thomas, le prospecteur minéralogiste,

Une île providentielle

Remettre les pieds sur une terre ferme, c'est pour nos hommes un retour à la vie.
Une fois séchés, réchauffés, leur premier empressement est de faire connaissance avec cette île où ils sont jetés loin de la civilisation. Cette île qu'ils baptisent L'Ile des Naufragés.
Une rapide tournée comble leurs espoirs. L'île n'est pas un désert aride. Ils sont bien les seuls hommes à l'habiter actuellement. Mais d'autres ont dû y vivre avant eux, s'il faut en juger par les restes de troupeaux demi-sauvages qu'ils ont rencontrés ici et là. Jacques, l'éleveur, affirme qu'il pourra les améliorer et en tirer un bon rendement.
Quant au sol de l'île, Paul le trouve en grande partie fort propice à la culture. Henri y a découvert des arbres fruitiers, dont il espère pouvoir tirer grand profit.
François y a remarqué surtout les belles étendues forestières, riches en bois de toutes sortes: ce sera un jeu d'abattre des arbres et de construire des abris pour la petite colonie.
Quant à Thomas, le prospecteur, il a noté plusieurs signes indiquant un sous-sol richement minéralisé. Malgré l'absence d'outils perfectionnés, Thomas se croit assez d'initiative et de débrouillardise pour transformer le minerai en métaux utiles.
Chacun va donc pouvoir se livrer à ses occupations favorites pour le bien de tous.

Les véritables richesses

Et voilà nos hommes à l'ouvrage.
Les maisons et des meubles sortent du travail du charpentier. Les premiers temps, on s'est contenté de nourriture primitive. Mais bientôt les champs produisent et le laboureur a des récoltes.
A mesure que les saisons succèdent aux saisons, le patrimoine de l'Ile s'enrichit. I1 s'enrichit, non pas d'or ou de papier gravé, mais des véritables richesses: des choses qui nourrissent, qui habillent, qui logent, qui répondent à des besoins.
La vie n'est pas toujours aussi douce qu'ils souhaiteraient. Il leur manque bien des choses auxquelles ils étaient habitués dans la civilisation. Mais leur sort pourrait être beaucoup plus triste.
D'ailleurs, ils ont déjà connu des temps de crise. Au moins, dans l'Ile des Naufragés, personne ne les condamne à voir pourrir sous leurs yeux des choses dont ils ont besoin. Puis les taxes sont inconnues. Si le travail est dur parfois, au moins on a le droit de jouir des fruits du travail.
Somme toute, on exploite l'île, espérant qu'un jour on pourra retrouver les parents et les amis, avec deux grands biens conservés: la vie et la santé.

Un inconvénient majeur

Nos hommes se réunissent souvent pour causer de leurs affaires.
Dans le système économique très simplifié qu'ils pratiquent, une chose les géne de plus en plus: ils n'ont aucune espèce de monnaie. Le troc, l'échange direct de produits contre produits, a ses inconvénients. Les produits à échanger ne sont pas toujours en face l'un de l'autre en même temps. Ainsi, du bois livré au cultivateur en hiver ne pourra être remboursé en légumes que dans six mois.

Parfois aussi, c'est un gros article livré d'un coup par un des hommes, et il voudrait en retour différentes petites choses produites par plusieurs des autres hommes, à des époques différentes.
Tout cela complique les affaires. S'il y avait de l'argent dans la circulation, chacun vendrait ses produits aux autres pour de l'argent. Avec l'argent reçu, il achèterait des autres les choses qu'il veut, quand il les veut et qu'elles sont là.
Tous s'entendent pour reconnaître la commodité que serait un système d'argent. Mais aucun d'eux ne sait comment en établir un. Ils ont appris à produire la vraie richesse, les choses. Mais ils ne savent pas faire les signes, l'argent.
Ils ignorent comment l'argent commence, et comment le faire commencer quand il n'y en a pas et qu'on décide ensemble d'en avoir... Bien des hommes instruits seraient sans doute aussi embarrassés; tous nos gouvernements l'ont bien été pendant la période 1929 - 1939. Seul, l'argent manquait aux pays, et les gouvernements restaient paralysés devant ce problème.

Arrivée d'un réfugié

Un soir que nos hommes, assis sur le rivage, ressassent ce problème pour la centième fois, ils voient soudain approcher une chaloupe avironnée par un seul homme.
On s'empresse d'aider le nouveau naufragé. On lui offre les premiers soins et on cause..
On apprend qu'il est échappé lui aussi à un naufrage et seul survivant. Son nom: Martin Golden. Heureux d'avoir un compagnon de plus, nos cinq hommes l'accueillent avec chaleur et lui font visiter la colonie.
- Quoique perdus loin du reste du monde, lui disent-ils, nous ne sommes pas trop à plaindre. La terre rend bien; la forêt aussi. Une seule chose nous manque: nous n'avons pas de monnaie pour faciliter les échanges de nos produits.
- Bénissez le hasard qui m'amène ici! répond Martin. L'argent n'a pas de mystère pour moi. Je suis un banquier, et je puis vous installer en peu de temps un système monétaire qui vous donnera satisfaction.
Un banquier !... Un banquier !... Un ange venu tout droit du ciel n'aurait pas inspiré plus de révérence. N'est-on pas habitué, en pays civilisé, à s'incliner devant les banquiers, qui contrôlent les pulsations de la finance ?

Le dieu de la civilisation

- Monsieur Martin, puisque vous êtes banquier, vous ne travaillerez pas dans l'île. Vous allez seulement vous occuper de notre argent.
- Je m'en acquitterai avec la satisfaction, comme tout banquier, de forger la prospérité commune.
- Monsieur Martin, on vous bâtira une demeure digne de vous. En attendant, peut-on vous installer dans l'édifice qui sert à nos réunions publiques ?
- Très bien, mes amis. Mais commençons par décharger les effets de la chaloupe que j'ai pu sauver dans le naufrage: une petite presse, du papier et accessoires, et surtout un petit baril que vous traiterez avec grand soin."
On décharge le tout. Le petit baril intrigue la curiosité de nos braves gens.
- Ce baril, déclare Martin, c'est un trésor sans pareil. Il est plein d'or !"
Plein d'or ! Cinq âmes faillirent s'échapper de cinq corps. Le dieu de la civilisation entré dans l'Ile des Naufragés. Le dieu jaune, toujours caché, mais puissant, terrible, dont la présence, l'absence ou les moindres caprices peuvent décider de la vie des nations !
- De l'or ! Monsieur Martin, vrai grand banquier! Recevez nos hommages et nos serments de fidélité.
- De l'or pour tout un continent, mes amis, répondit Monsieur Martin. Mais ce n'est pas de l'or qui va circuler. Il faut cacher l'or: l'or est l'âme de tout argent sain. L'âme doit rester invisible. Je vous expliquerai tout cela en vous passant de l'argent.

Un enterrement sans témoin

Avant de se séparer pour la nuit, Martin leur pose une dernière question:
- Combien vous faudrait-il d'argent dans l'île pour commencer, pour que les échanges marchent bien ?"
On se regarde. On consulte humblement Martin lui-même. Avec les suggestions du bienveillant banquier, on convient que 200 $ pour chacun paraissent suffisants pour commencer. Rendez-vous fixé pour le lendemain soir.

Martin, lui, ne perd pas de temps. Il oublie sa fatigue pour ne penser qu'à son avenir de banquier. A la faveur du petit jour, il creuse un trou, y roule son baril, le couvre de terre, le dissimule sous des touffes d'herbe soigneusement placées, y transplante même un petit arbuste pour cacher toute trace.
Puis, il met en oeuvre sa petite presse, pour imprimer mille billets d'un dollar. En voyant les billets sortir, tout neufs, de sa presse, il songe en lui même: "Comme ils sont faciles à faire, ces billets ! Ils tirent leur valeur des produits qu'ils vont servir à acheter. Sans produits, les billets ne vaudraient rien. Mes cinq naïfs de clients ne pensent pas à cela. Ils croient que c'est l'or qui garantit les dollars. Je les tiens par leur ignorance !" Le soir venu, les cinq arrivent en courant près de Martin.

A qui ira l'argent fabriqué?

Cinq piles de billets étaient là, sur la table.
- Avant de vous distribuer cet argent, dit le banquier, il faut s'entendre. L'argent est basé sur l'or. L'or, placé dans la voûte de ma banque, est à moi. Donc, l'argent est à moi... Oh! ne soyez pas tristes. Je vais vous prêter cet argent, et vous l'emploierez à votre gré. En attendant, je ne vous charge que l'intérêt. Vu que l'argent est rare dans l'Ile, puisqu'il n'y en a pas du tout, je crois être raisonnable en demandant un petit intérêt de 8 pour cent seulement.
- En effet, monsieur Martin, vous êtes très généreux.
- Un dernier point, mes amis. Les affaires sont les affaires, même entre grands amis. Avant de toucher son argent, chacun de vous va signer ce document: c'est l'engagement par chacun de rembourser capital et intérêts, sous peine de confiscation par moi de ses propriétés. Oh ! une simple garantie. Je ne tiens pas du tout à jamais avoir vos propriétés, je me contente d'argent. Je suis sûr que vous garderez vos biens et que vous me rendrez l'argent.
- C'est plein de bon sens, monsieur Martin. Nous allons redoubler d'ardeur au travail et tout rembourser.
- C'est cela. Et revenez me voir chaque fois que vous avez des problèmes. Le banquier est le meilleur ami de tout le monde... Maintenant, voici à chacun ses deux cents dollars."
Et nos cinq hommes s'en vont ravis, les dollars plein les mains et plein la tête.

Un problème d'arithmétique

L'argent de Martin a circulé dans l'Ile. Les échanges se sont multipliés en se simplifiant. Tout le monde se réjouit et salue Martin avec respect et gratitude.
Cependant, le prospecteur, est inquiet. Ses produits sont encore sous terre. Il n'a plus que quelques piastres en poche. Comment rembourser le banquier à l'échéance qui vient?

Après s'être longtemps creusé la tête devant son problème individuel, Thomas se dit:
"Considérant la population entière de l'île, songe-t-il, sommes-nous capables de tenir nos engagements? Martin a fait une somme totale de $1000. Il nous demande au total $1080. Quand même nous prendrions ensemble tout l'argent de l'île pour le lui porter, cela ferait 1000 pas 1080. Personne n'a fait les $80 de plus. Nous faisons des choses, pas des dollars. Martin pourra donc saisir toute l'île, parce que tous ensemble, nous ne pouvons rembourser capital et intérêts.
Si ceux qui sont capables remboursent pour eux-mêmes sans se soucier des autres, quelques-uns vont tomber tout de suite, quelques autres vont survivre. Mais le tour des autres viendra et le banquier saisira tout. Il vaut mieux s'unir tout de suite et régler cette affaire collectivement."

Thomas n'a pas de peine à convaincre les autres que Martin les a dupés. On s'entend pour un rendez-vous général chez le banquier.

Bienveillance du banquier

Martin devine leur état d'âme, mais fait bon visage. L'impulsif François présente le cas:
- Comment pouvons-nous vous apporter $1080 quand il n'y a que $1000 dans toute l'ile ?
- C'est l'intérêt, mes bons amis. Est-ce que votre production n'a pas augmenté ?
- Oui, mais l'argent, lui, n'a pas augmenté. Or, c'est justement de l'argent que vous réclamez, et non pas des produits. Vous seul pouvez faire de l'argent. Or vous ne faites que $1000 et vous demandez $1080. C'est impossible!
- Attendez, mes amis. Les banquiers s'adaptent toujours aux conditions, pour le plus grand bien du public... Je ne vais vous demander que l'intérêt. Rien que $80. Vous continuerez de garder le capital.
- Vous nous remettez notre dette ?
- Non pas. Je le regrette, mais un banquier ne remet jamais une dette. Vous me devrez encore tout l'argent prêté. Mais vous ne me remettrez chaque année que l'intérêt, je ne vous presserai pas pour le remboursement du capital. Quelques-uns parmi vous peuvent devenir incapables de payer même leur intérêt, parce que l'argent va de l'un à l'autre. Mais organisez-vous en nation, et convenez d'un système d'imposition. Vous taxerez davantage ceux qui auront plus d'argent, les autres moins. Pourvu que vous m'apportiez collectivement le total de l'intérêt, je serai satisfait et votre nation se portera bien.
Nos hommes se retirent, mi calmés, mi-pensifs.

L'extase de Martin Golden

Martin est seul. Il se recueille. Il conclut: "Mon affaire est bonne. Bons travailleurs, ces hommes, mais ignorants. Leur ignorance et leur crédulité font ma force. Ils voulaient de l'argent, je leur ai passé des chaînes. Ils m'ont couvert de fleurs pendant que je les roulais Oh! grand Rothschild, je sens ton génie de banquier s'emparer de mon être. Tu l'as bien dit, illustre maître: "Qu'on m'accorde le contrôle de la monnaie d'une nation et je me fiche de qui fait ses lois". Je suis le maître de l'Ile des Naufragés, parce que je contrôle son système d'argent. Je pourrais contrôler un univers. Ce que je fais ici, je puis le faire dans le monde entier."

Et toute la structure du système bancaire rothschildien se dresse dans l'esprit ravi de Martin.

Crise de vie chère

Cependant, la situation empire dans l'Ile des Naufragés. La productivité a beau augmenter, les échanges ralentissent. Martin pompe régulièrement ses intérêts. Il faut songer à mettre de l'argent de côté pour lui. L'argent colle, il circule mal.
Ceux qui paient le plus de taxes crient contre les autres et haussent leurs prix pour trouver une compensation. Les plus pauvres, qui ne paient pas de taxes, crient contre la cherté de la vie et achètent moins.
Le moral baisse, la joie de vivre s'en va. On n'a plus de coeur à l'ouvrage. A quoi bon? Les produits se vendent mal; et quand ils se vendent, il faut donner des taxes pour Martin. On se prive.
C'est la crise. Et chacun accuse son voisin de manquer de vertu et d'être la cause de la vie chère.
Un jour, Henri, réfléchissant au milieu de ses vergers, conclut que le "progrès" apporté par le système monétaire du banquier a tout gâté dans l'Ile. Assurément, les cinq hommes ont leurs défauts; mais le système de Martin nourrit tout ce qu'il y a de plus mauvais dans la nature humaine.
Henri décide de convaincre et rallier ses compagnons. Ils commence par Jacques. C'est vite fait: "Eh ! dit Jacques, je ne suis pas savant, moi; mais il y a longtemps que je le sens: le système de ce banquier-là est plus pourri que le fumier de mon étable du printemps dernier !"
Tous sont gagnés l'un après l'autre, et une nouvelle entrevue avec Martin est décidée.

Chez le forgeur de chaînes

Ce fut une tempête chez le banquier:
- L'argent est rare dans l'île, monsieur, parce que vous nous l'ôtez. On vous paie, on vous paie, et on vous doit encore autant qu'au commencement. On travaille, on fait de plus belles terres, et nous voilà plus mal pris qu'avant votre arrivée.!
- Allons, mes amis, raisonnons un peu. Si vos terres sont plus belles, c'est grâce à moi. Un bon système bancaire est le plus bel actif d'un pays. Mais pour en profiter, il faut garder avant tout la confiance dans le banquier. Venez à moi comme à un père... Vous voulez d'autre argent ? Très bien. Mon baril d'or vaut bien des fois mille dollars... Tenez, je vais hypothéquer vos nouvelles propriétés et vous prêter un autre mille dollars tout de suite.
- Deux fois plus de dette ? Deux fois plus d'intérêt à payer tous les ans, sans jamais finir?
- Oui, mais je vous en prêterai encore, tant que vous augmenterez votre richesse foncière; et vous ne me rendrez jamais que l'intérêt. Vous empilerez les emprunts; vous appellerez cela dette consolidée. Dette qui pourra grossir d'année en année. Mais votre revenu aussi. Grâce à mes prêts, vous développerez votre pays.
- Alors, plus notre travail fera l'île produire, plus notre dette totale augmentera ?
- Comme dans tous les pays civilisés. La dette publique est un baromètre de la prospérité.

Le loup mange les agneaux

- C'est cela que vous appelez monnaie saine, monsieur Martin ? Une dette nationale devenue nécessaire et impayable, ce n'est pas sain, c'est malsain.
- Messieurs, toute monnaie saine doit être basée sur l'or et sortir de la banque à l'état de dette. La dette nationale est une bonne chose: elle place; les gouvernements sous la sagesse incarnée dans les banquiers. A titre de banquier, je suis un flambeau de civilisation dans votre île.
- Monsieur Martin, nous ne sommes que des ignorants, mais nous ne voulons point de cette civilisation-là ici. Nous n'emprunterons plus un seul sou de vous. Monnaie saine ou pas saine, nous ne voulons plus faire affaire avec vous.
- Je regrette cette décision maladroite, messieurs. Mais si vous rompez avec moi, j'ai vos signatures. Remboursez-moi immédiatement tout, capital et intérêts.
- Mais c'est impossible, monsieur. Quand même on vous donnerait tout l'argent de l'île, on ne serait pas quitte.
- Je n'y puis rien. Avez-vous signé, oui ou non? Oui? Eh bien, en vertu de la sainteté des contrats, je saisis toutes vos propriétés gagées, tel que convenu entre nous, au temps où vous étiez si contents de m'avoir. Vous ne voulez pas servir de bon gré la puissance suprême de l'argent, vous la servirez de force. Vous continuerez à exploiter l'Ile, mais pour moi et à mes conditions. Allez. Je vous passerai mes ordres demain.

Le contrôle des journaux

Comme Rothschild, Martin sait que celui qui contrôle le système d'argent d'une nation contrôle cette nation. Mais il sait aussi que, pour maintenir ce contrôle, il faut entretenir le peuple dans l'ignorance et l'amuser avec autre chose.
Martin a remarqué que, sur les cinq insulaires, deux sont conservateurs et trois sont libéraux. Cela paraît dans les conversations des cinq, le soir, surtout depuis qu'ils sont devenus ses esclaves. On se chicane entre bleus et rouges.
De temps en temps, Henri, moins partisan, suggère une force dans le peuple pour faire pression sur les gouvernants... Force dangereuse pour toute dictature.
Martin va donc s'appliquer à envenimer leurs discordes politiques le plus possible.
Il se sert de sa petite presse et fait paraître deux feuilles hebdomadaires: "Le Soleil", pour les rouges; "L'Étoile", pour les bleus. "Le Soleil" dit en substance: Si vous n'êtes plus les maîtres chez vous, c'est à cause de ces arriérés de bleus, toujours collés aux gros intérêts.
"L'Étoile" dit en substance: Votre dette nationale est l'oeuvre des maudits rouges, toujours prêts aux aventures politiques.
Et nos deux groupements politiques se chamaillent de plus belle, oubliant le véritable forgeur de chaînes, le contrôleur de l'argent, Martin.

Une épave précieuse

Un jour, Thomas, le prospecteur, découvre, échouée au fond d'une anse, au bout de l'ile et voilée par de hautes herbes, une chaloupe de sauvetage, sans rame, qui ne contient qu'une caisse assez bien conservée.
Il ouvre la caisse: outre du linge et quelques menus effets, son attention s'arrête sur un livre-album en assez bon état, intitulé: Première année de Vers Demain
Curieux, notre homme s'assied et ouvre ce volume. Il lit. Il dévore. Il s'illumine:
"Mais, s'écrie-t-il, voilà ce qu'on aurait dû savoir depuis longtemps: L'argent ne tire nullement sa valeur de l'or, mais des produits que l'argent achète. L'argent peut être une simple comptabilité, les crédits passant d'un compte à l'autre selon les achats et les ventes. Le total de l'argent doit être en rapport avec le total de la production. A toute augmentation de production, doit correspondre une augmentation équivalente d'argent... Jamais d'intérêt à payer sur l'argent naissant... Le progrès représenté, non pas par une dette publique, mais par un dividende égal à chacun... Les prix, ajustés au pouvoir d'achat par un coefficient des prix... Le Crédit Social..."
Thomas n'y tient plus. Il se lève et court, avec son livre, faire part de sa splendide découverte à ses quatre compagnons.

L'argent, simple comptabilité

Et Thomas s'installe professeur:
- Voici, dit-il, ce qu'on aurait pu faire, sans le banquier, sans or, sans signer aucune dette. J'ouvre un compte au nom de chacun de vous. A droite, les crédits, ce qui ajoute au compte; à gauche, les débits, ce qui le diminue.
On voulait chacun $200 pour commencer. D'un commun accord, décidons d'écrire $200 au crédit de chacun. Chacun a tout de suite $200. François achète des produits de Paul, pour $10. Je retranche 10 à François, il lui reste 190. J'ajoute 10 à Paul, il a maintenant 210. Jacques achète de Paul pour $8. Je retranche 8 à Jacques, il garde 192. Paul, lui, monte à 218. Paul achète du bois de François, pour $15. Je retranche 15 à Paul, il garde 203; j'ajoute 15 à François, il remonte à 205.
Et ainsi de suite; d'un compte à l'autre, tout comme des billets en papier vont d'une poche à l'autre.
Si l'un de nous a besoin d'argent pour augmenter sa production, on lui ouvre le crédit nécessaire, sans intérêt. Il rembourse le crédit une fois la production vendue. Même chose pour les travaux publics.
On augmente aussi, périodiquement, les comptes de chacun d'une somme additionnelle, sans rien ôter à personne, en correspondance de la création globale de biens et services. C'est le dividende national: l'argent est ainsi un instrument de service.

Désespoir du banquier

Tous ont compris. La petite nation est devenue créditiste. Le lendemain, le banquier Martin reçoit une lettre signée des cinq:
"Monsieur, vous nous avez endettés et exploités sans aucune nécessité. Nous n'avons plus besoin de vous pour régir notre système d'argent. Nous aurons désormais tout l'argent qu'il nous faut, sans or, sans dette, sans voleur. Nous établissons immédiatement dans l'Ile des Naufragés le système du Crédit Social. Le dividende national remplacera la dette nationale. Si vous tenez à votre remboursement, nous pouvons vous remettre tout l'argent que vous avez fait pour nous, pas plus. Vous ne pouvez réclamer ce que vous n'avez pas fait."

Martin est au désespoir. C'est son empire qui s'écroule. Les cinq devenus créditistes, plus de mystère d'argent ou de crédit pour eux. "Que faire? Leur demander pardon, devenir comme l'un d'eux ? Moi, banquier, faire cela ?... Non. Je vais plutôt essayer de me passer d'eux et de vivre à l'écart.

Supercherie mise à jour

Pour se protéger contre toute réclamation future possible, nos hommes ont décidé de faire signer au banquier un document attestant qu'il possède encore tout ce qu'il avait en venant dans l'île. D'où l'inventaire général: la chaloupe, la petite presse et... le fameux baril d'or.
Il a fallu que Martin indique l'endroit, et l'on déterre le baril. Nos hommes le sortent du trou avec beaucoup moins de respect cette fois. Le Crédit Social leur a appris à mépriser le fétiche or.

Le prospecteur, en soulevant le baril, trouve que pour de l'or, il ne pèse pas beaucoup: "Je doute fort que ce baril soit plein d'or", dit-il.
Un coup de hache et le baril étale son contenu: d'or, pas une once ! Des roches - rien que de vulgaires roches sans valeur !...
Nos hommes n'en reviennent pas:
- Dire qu'il nous a mystifiés à ce point-là, le misérable ! A-t-il fallu être gogos, aussi, pour tomber en extase devant le seul mot OR !
- Dire que nous lui avons gagé toutes nos propriétés pour des bouts de papier basés sur quatre pelletées de roches ! Voleur doublé de menteur !
- Dire que nous nous sommes boudés et haïs les uns les autres pendant des mois et des mois pour une supercherie pareille ! Le démon !"
A peine François avait-il levé sa hache que le banquier partait à toutes jambes vers la forêt.



Bonjour fidèles lectrices et lecteurs 

Les trois apologues précédents ( "La Dame de Condé" , "Le conte de Roseland" et "L'île des naufragés") qu'il vaut mieux avoir lu dans l'ordre car j'essaye de permettre une approche logique du fait économique, et c'est la raison pour laquelle je vais à partir de maintenant numéroter les posts - vont quand même me faciliter la tâche, car, s'ils ne vous ont pas permis de répondre à toutes les questions que vous vous posez (si c'était le cas, à quoi ça servirait que Ducros y se décarcasse ? ) , ils ont sans doute commencé à vous "ouvrir les yeux" et vous commencez déjà à avoir "un autre regard" (enfin, j'espère ).

Si je me suis engagé envers vous et les gestionnaires de "onnouscachetout" et que j'ai donc des comptes à vous rendre, je n'ai malheureusement pas de conte en support de l'explication que je vais essayer de vous donner à cette question fondamentale pour comprendre le "système", question récurrente qui est 4. " Mais comment pousse la monnaie?" (cette foutue monnaie qui nous pourrie la vie)

La première chose, c'est que je voudrais que vous rejetiez complètement une idée sans doute enfouie au fond de votre esprit lorsque vous allez voir un banquier en disant "j'ai besoin d'un prêt", ou "j'ai besoin d'un découvert" . Cette idée , c'est celle de penser que pour qu'un banquier puisse vous proposer un crédit, il FAUT qu'un épargnant soit passé avant vous à la banque pour y déposer des économies correspondantes au prêt que vous allez demander, et que, quasiment, c'est l'épargne d'un autre que le banquier va vous prêter, en prenant sa commission au passage (l'intérêt).... c'est FAUX, ce n'est pas ainsi que ça se passe.
Ce n'est pas de la monnaie épargnée ou déposée que vous prête un banquier... d'ailleurs, si vous avez la chance d'être plutôt en positif sur votre compte, vous pouvez vous apercevoir que jamais votre banque vous a dit " On a utilisé l'argent que vous aviez en dépot chez nous pour le préter à Monsieur Untel ... désolé, votre compte est maintenant à zéro, jusqu'à ce que Monsieur Untel rembourse..."

Il y a une phrase que connaissent bien les économistes (pas tous , hélas) , mais qu'oublient très souvent les banquiers (le feraient-ils exprès ?), et qui est " Ce ne sont pas les dépôts qui permettent les crédits, mais ce sont les crédits qui permettent les dépôts"

Du chinois ? .... 

Allez, on s'explique!

D'abord, il faut que vous sachiez qu'il n'y a pas de "banque nationale" (la BNP par exemple, bien que se nommant "Banque Nationale de Paris", est une société privée), et la Banque Centrale Européenne - qui est "garante" des bons fonctionnements des banques privées - est une émanation des Banques Centrales des états membres , ces Banques Centrales étant elles mêmes des "réunions" des banques privées)

Ensuite il faut que vous sachiez aussi que l'article 104 du traité de Maastrisch a INTERDIT aux Etats et aux Collectivités de créer de la monnaie .. c'est réservé au système bancaire sous surveillance de la BCE dont le seul mandat des Etats est de "limiter l'inflation" (on en reparlera, ainsi que des conséquences de cet article 104 aussi bien sur la pauvreté, le chômage et les déficits). ..

Voyons donc comment le système bancaire crée la monnaie ...

Nous sommes par exemple dans un système de 4 banques privées (B1, B2, B3, B4, .. mais vous pouvez remplacer ces sigles par BNP, SG, CL, CA, par exemple ..)

Prenons un exemple dans lequel les "régles prudencielles" en vigueur en ce moment permettent aux banques d'offrir des crédits jusqu'à un montant de 90% des dépots (c'est très variable puisque c'est un des moyens de régulation des crédits et donc de la monnaie comme vous le comprendrez à la fin de ce mail) .

La banque B1 recoit en dépot 1000 euros (c'est Monsieur A qui dépose cet argent sur son compte courant). C'est évidemment une dette que la banque B1 a envers Monsieur A ... car la banque s'est bien engagée à rendre cet argent à Monsieur A à sa première demande.

Monsieur B demande et obtient un crédit à la Banque B1 qui donc, en fonction de ces régles prudencielles, lui propose 900 euros ( 1000 x 90%) avec 10% d'intéret sur un an... Monsieur B devra donc rembourser 990 euros ...

Vous pouvez évidemment remarquer que le compte de Monsieur A n'a pas bougé ( il est toujours de 1000 euros) comme d'ailleurs ne bougeront pas les comptes des déposants dans les explications qui suivent.

Avec ce crédit de 900 euros, Monsieur B paye un de ses fournisseurs, Monsieur C, qui va déposer son chèque dans la Banque B2 . Grâce à ce dépot, Monsieur D peut obtenir de la banque B2 un crédit de 810 euros (900 x 90%) qu'il devra rembourser 891 euros ( 810 +10%).

Monsieur D paye à son tour un de ses fournisseurs, Monsieur E, avec ses 810 euros , lequel Monsieur E le dépose à sa Banque B3. Grace à ce dépot, Monsieur F peut obtenir de la banque B3 un crédit de 729 euros (810 x 90%) qu'il devra rembourser 802 euros ( 729 +10%).

Allez, encore une fois...

Avec ce crédit de 729 euros, Monsieur F paye un de ses fournisseurs, Monsieur G, qui va déposer son chèque dans la Banque B4 . Grace à ce dépot, Monsieur H peut obtenir de la banque B4 un crédit de 656 euros (729 x 90%) qu'il devra rembourser 721 euros ( 656 +10%).

Monsieur H paye à son tour un de ses fournisseurs, Monsieur A, avec ses 656 euros , lequel Monsieur A le dépose à sa Banque B1. Grace à ce dépot, Monsieur X peut obtenir de la banque....

Avec ce système de 4 banques et de 4 emprunteurs, voyons le "bilan"

- D'un dépot initial de 1000 euros, c'est 900+810+729+656 = 3095 euros en circulation qui ont été créés "en plus"

- Sur un an, les emprunteurs (Messieurs B, D, F, H) devront rembourser: 990+891+802+721 = 3404 ... le système bancaire a donc gagné 3404 - 3095 = 309 euros

- Vous avez vu la petite astuce de mon exemple... Monsieur H paye avec son crédit une dette qu'il a envers Monsieur A: donc 66% du dépot initial dans la banque B1 (par Monsieur A) proviennent des crédits que son propre dépot permet... (je sais, c'est pas facile à piger... surtout si vous faites intervenir l'ordre chronologique ci dessus, dans ce qui n'est qu'un exemple)

D'une manière plus générale...

- Bien évidemment, c'est un cycle permanent.. des crédits sont remboursés et d'autres les remplacent... mais il faut toujours de plus en plus de crédits pour pouvoir créer la monnaie qui sert à payer les intérets. Je dirais que les banquiers se fichent pas mal du capital (qui n'est qu'une simple ligne d'écriture), alors que les intérêts (qui vont dans leur poche), ça, oui, ils aiment!

- Vous comprenez donc maintenant pourquoi au lendemain (ou surlendemain ?) du 11 septembre l'un des premiers discours de Bush a été "il faut soutenir la consommation ... ayez confiance" car si la confiance disparait, il n'y a plus de crédit pour remplacer ceux arrivés à expiration, et c'est donc tout le système bancaire et économique qui s'écroule puisque les intérêts ne pourront plus être payés... il a aussi fait diminuer immédiatement les taux d'intérêts pour "pousser à la consommation"...

- Accessoirement, l'intérêt c'est la cause principale de l'inflation (on en reparlera) ... ici, j'ai été gentil, parce qu'avec un crédit à 9% par an , par le jeu des intérêts composés, c'est le double de la somme empruntée qui doit être remboursée sur 10 ans...

- Ceci explique que ce que l'on appelle le "coefficient multiplicateur" s'établit (dans la réalité) à 6,5 (pour 1000 euros, c'est 6500 qui sont créés)... c'est à dire qu'il y a 6,5 fois plus de crédits "en circulation" que de dépots qui ont permis ces crédits... et, en remontant "à l'origine", il n'y a que #15% (100/6,5) de ce que les économistes appellent parfois "monnaie permanente" (billets et pièces), pour la différencier de la "monnaie temporaire" (monnaie de crédit , qui "s'efface" quand le crédit est rembousé). Ce qui a aussi pour conséquence que dans les banques il n'y a que 15% de monnaie sous forme de billets ou pièces: une panique et les portes seront vites fermées, vous ne pourrez partir avec votre argent.

- Vous voyez aussi qu'on a pas parlé "d'adossement sur l'or" ... oubliez cela, c'est fini depuis longtemps! L'or n'est plus qu'une matière première et la monnaie n'est plus gagée sur l'or.

- Enfin vous remarquerez que comme l'écrit le seul prix Nobel d'économie français que nous ayons jamais eu (Maurice Allais, en 1988): " Dans son essence la création de monnaie actuelle ex-nihilo par le système bancaire est identique à la création de monnaie par les faux monnayeurs. Concrètement elle aboutit aux mêmes résultats. La seule différence est que ceux qui en profitent sont différents"

- Je rajoute que le système bancaire jouis du privilège insensé de pouvoir créer de la monnaie sur ses propres dettes (ses dettes à ses déposants).

Dernier point: si vous discutez avec votre banquier ne lui dites pas " votre banque peut créer de la monnaie" .. ce serait faux, elle ne peut que créer du crédit.

Par contre, si vous lui dites " le système bancaire pris dans son ensemble, système dont fait partie votre banque , crée de la monnaie payante ex nihilo" ce sera vrai et il sera un peu géné... accessoirement donc, la connaissance du système vous permettra de pouvoir discuter d'égal à égal avec lui et qui sait, d'obtenir de meilleures conditions si vous avez besoin d'un crédit ...

Allez, à bientôt pour une autre séance d'anti-auto-conditionnement à la "pensée unique" ...

Cordialement

AJH



Bonjour

Séance N°5 contre la "pensée unique" 

Vous avez donc compris "comment pousse la monnaie".. et j'ai écrit qu'on reparlerait des conséquences de l'article 104 du traité de Maastrich sur la pauvreté, le chômage et les déficits. En fait, je vais le faire maintenant et dans le thread suivant, en analysant les conséquences de l'intérêt, puisque, que ce soit les particuliers ou les Etats, il faut passer par ces fourches caudines pour se procurer la monnaie nécessaire à une politique de consommation et d'investissement volontariste ( "consommation et investissements volontariste" peuvent tout à fait être dans un sens écologique .. pensez aux énergies alternatives. Ne "rejetez"donc pas les deux par principe)

Voici un extrait de mon livre (la monnaie, chapitre 3, p.88)

5. L’intérêt de l’argent : « L’effet papillon » du monde économique

L’intérêt procuré par l’argent est probablement le concept économique le plus pernicieux car étant apparemment de petite valeur, quelques pour-cents, il a tendance à être négligé, sous-estimé, accepté comme une chose naturelle. Il avance masqué, et comme il est l’ami de tous, ses méfaits ne lui sont jamais attribués et son existence n’est ainsi jamais remise en cause. Pourtant, l’effet papillon que la science nous a révélé, montre que des petites causes peuvent engendrer de grands effets. Il en est de même avec l’intérêt. Nous allons en examiner quelques aspects.

• Il a le pouvoir de transférer l’argent de ceux qui en manquent à ceux qui en ont le plus.
Il masque bien sa capacité fondamentale à transférer l’argent des mains de ceux qui n’en ont pas, à ceux qui en ont le plus. En effet, les premiers sont obligés d’emprunter de l’argent car ils en ont besoin pour vivre et les seconds leur prêtent puisqu’ils en disposent, n’en ayant pas besoin. Ainsi, par exemple, pour 100 euros prêtés, il faut en rembourser 110 . Les 10 euros d’intérêts sont donc pris à ceux qui ont besoin d’argent, pour être donnés à ceux qui en ont déjà. L’intérêt est donc bien le facteur prépondérant de l’accumulation de richesse.
Un exemple, plus quantitatif, est tiré d’une étude qui a été faite en Allemagne par Margrit KENNEDY pour montrer le fonctionnement insidieux de notre système monétaire.
Il n’y a pas que ceux qui empruntent de l’argent qui payent des intérêts, car, contrairement à ce que l’on pourrait croire, nous en payons tous, sans même nous en rendre compte.
En effet, dès que nous achetons un bien ou un service, nous payons toujours une part d’intérêts incluse dans le prix et cette part est fonction des investissements qui ont été nécessaires pour la production considérée. Pour des services de main-d’œuvre, cette part est voisine de 10 %, mais elle peut atteindre 80 % si la production nécessite beaucoup de capital et peu de main-d’œuvre. En moyenne, la moitié de nos prix hors taxes représente le coût du capital.

L’étude a porté sur 25 millions de foyers allemands, répartis en 10 classes (de 1 à 10) selon leurs revenus.
Pour chacune de ces classes, il a été pris en compte les intérêts payés, inclus dans les achats de biens de consommation, et ceux perçus par les placements de l’épargne.
Les résultats figurent sur une courbe qui ne figure pas ici. Cette courbe met en lumière que l’intérêt ne profite qu’à la tranche supérieure, c’est-à-dire à 10 % de la population la plus aisée, qu’il est neutre pour les 10 % de la classe 9 et qu’il est prélevé sur les 8 premières tranches soit 80 % de la population. Cette courbe justifie aussi l’appauvrissement des classes moyennes.
Le problème est qu’on a fait de l’argent une denrée rare et chère, une « marchandise », et que l’argent « créé » est réservé aux riches qui en ont déjà... alors que ça devrait être l’inverse.

• La croissance exponentielle ne se trouve pas dans la nature.
Pour justifier cela, il est intéressant de rappeler l’histoire de la découverte du jeu d’échecs par un sujet d’un empereur perse. Celui-ci, par enthousiasme, voulut récompenser l’inventeur de ce jeu en lui offrant ce qu’il désirait. La demande du rusé inventeur parut bien modeste et fut donc acceptée. Il s’agissait de placer un grain de blé sur la première case de l’échiquier, deux grains sur la seconde, quatre sur la troisième puis de continuer ainsi à doubler sur chacune des autres cases. Notre malheureux Empereur, peu mathématicien, a été victime, sans pouvoir l’anticiper, d’une croissance exponentielle car la quantité de blé nécessaire à la dernière case représentait des centaines de fois la production de toute la planète.
Une seconde anecdote rappelle que le placement de quelques sous à l’époque du Christ, à 4 % d’intérêt, correspondrait aujourd’hui à plusieurs fois le poids en or de la planète.
Enfin l'histoire vraie actuelle montre que les déficits budgétaires successifs de la France ont conduit à une dette publique qui aujourd’hui (chiffres de 1999, mais ça ne s'est pas amélioré, désolé d'être resté en francs, je trouve que c'est plus "parlant", sans doute encore pour quelques années) dépasse les 4000 milliards de francs, ce qui coûte 236 milliards de francs environ d’intérêts par an, soit plus de 646 millions par jour, ou 27 millions à l’heure ou enfin 450.000 F à la minute.

=>Par l’intermédiaire de l’intérêt, une somme colossale est transférée du monde économique au monde financier, et contribue à l’asphyxie du premier et à la congestion du second.

• Les banques créent bien l’argent des prêts, mais elles ne créent pas simultanément l’argent des intérêts.
Quand on emprunte de l’argent à une banque, par un simple jeu d’écriture dans ses comptes (comme nous l'avons vu dans le sujet "4 - mais comment pousse la monnaie? " ) , elle crée cet argent ex nihilo et la masse monétaire s’accroît d’autant. C’est l’inverse quand cet argent est remboursé, la banque le fait alors disparaître de ses comptes et la masse monétaire diminue.
Mais à cause de l’intérêt, le mécanisme est plus subtil. En effet, si l’on emprunte à la banque 10.000 E à 10 % l’an, on lui remboursera 11.000 E l’année suivante. Mais la banque n’ayant créé à l’origine que 10.000 E, comment pourra-t-on en rembourser 11.000 ? D’où proviendront les 1000 E de plus qui n’auront pas été créés par ceux capables de le faire ?
Eh bien ils proviendront de deux sources possibles :
1- L’une est celle des faillites, personnelles ou d’entreprises, car dans ce cas on perd bien un patrimoine qui avait une valeur, au profit d’une tierce personne.
2 - L’autre est celle qui oblige à réemprunter pour rembourser les intérêts du premier prêt, ce qui fait partir dans la spirale sans fin du surendettement. C'est évidemment la source la plus habituelle et la plus pernicieuse.

• Comment l’argent qui est passif, peut-il « produire » de l’argent, c’est-à-dire s’autogénérer ?
C’est bien sûr une impossibilité physique qui met bien en lumière la perversité du mécanisme. Un billet de 100 E ne va pas générer une pièce de 10 E et la masse monétaire qui tourne pour dynamiser l’économie ne produit pas des billets pour payer des intérêts. Ce n’est que le travail qui crée des richesses et si l’on prête de l’argent à un ami qui veut réaliser un projet, il est bien normal que ce dernier partage ensuite les fruits qu’il en aura obtenus. Il pourra alors rembourser celui qui lui a fait confiance et ajouter des "intérêts" (que je préfère appeler "dividendes"), c’est-à-dire une partie de ses gains.
=> Mais au niveau d’un pays ou de toute communauté autonome, l’intérêt n’a aucun sens puisqu’une collectivité doit émettre la monnaie nécessaire à ses échanges.

• Pourquoi la monnaie est-elle sous-estimée en économie ?
Parce que la pensée économique libérale historique veut qu’une monnaie soit « neutre » et ne soit qu’un « voile » ne modifiant en rien les échanges de biens et de services.
Cela est vrai, mais il y a un présupposé qu’il n’était pas nécessaire de relever à l’époque.
=> La monnaie est bien neutre, mais à une seule condition, c’est qu’elle existe en quantité suffisante pour permettre de réaliser les échanges.
Or aujourd’hui ce n’est plus le cas, il y a bien anémie monétaire du circuit économique et elle est la cause du chômage puis de l’exclusion.
Il en est de même pour le corps humain. Quand il est en parfaite santé, le sang est « neutre », on ne s’en soucie pas, il alimente harmonieusement tous les organes. Mais si les globules rouges viennent à manquer, l’anémie s’installe, le corps entier devient malade et le sang ne peut plus être « neutre ». Eh bien, il en est de même pour la monnaie !

A bientôt pour la suite

Cordialement

AJH



Bonjour

Pour se détendre un peu, je commence par un petit conte.

6. Comment le sultan IFO s’aperçut qu’il pouvait faire beaucoup sans dépenser...

Il y eut une fois, il y a fort longtemps, dans un pays qui s’appelait La Francassie, une terrible tempête océane.
Des forêts entières furent abattues, mais surtout, le peuple de l’Ouest vécut de très longues journées sans électricité, les pylônes et les lignes ayant été abattus.

Le sultan IFO manda son Grand Argentier et lui tint à peu près ce langage :
— Monsieur le Grand Argentier, je désire que l’ensemble des câbles électriques de la Francassie soit enterré, afin que si survient de nouveau un jour une si terrible tempête, le bon peuple n’en souffre plus et que les techniciens de l’électricité puissent passer les fêtes de fin d’année tranquillement au coin du feu, avec leur famille, au lieu de grimper sur des pylônes dans le froid et la pluie. Ceci également rendra plus accueillants les paysages de notre merveilleux pays pour les millions d’étrangers qui le visitent chaque année au grand bénéfice de notre balance des paiements.

Le Grand Argentier obtempéra, appela le directeur général de la Distribution d’Électricité en Francassie (D.E.F.) et lui transmit les souhaits du Sultan.
— Impossible, lui répondit celui-ci, cela coûterait 100 Milliards de francass TTC (soit 83 M de francass HT), nous n’en avons pas les moyens.

Le grand Argentier rapporta cette conversation au sultan IFO qui réfléchit quelques jours et ordonna que :
• La D.E.F. soit maître d’œuvre de l’enfouissement des lignes électriques en Francassie.
• Qu’elle prendrait les sous-traitants qu’elle souhaitait
• Que les travaux seraient payés au fur et à mesure des avancements par l’État qui les financerait, ainsi elle n’aurait nul besoin de crédit bancaire, mais aux conditions suivantes :
- Qu’il n’y ait aucune importation, de matières ou de produits finis. Tout devait être extrait et transformé en Francassie.
- Que les entreprises sous-traitantes ne fassent, sur ce chantier, aucun bénéfice. C’est-à-dire que le flux d’argent entrant devait être intégralement distribué, soit en salaires, soit en paiement de fournisseurs amont, soit en Taxe Vraiment Admirable (1) qui était un impôt sur l’ajout de la valeur que réalisait chaque créateur de biens ou de service, soit en charges en retour à l’État. Il n’y aurait donc aucun impôt sur ces sociétés puisqu’elles ne faisaient pas de bénéfices.
- Que seuls des salaires seraient payés, du balayeur au directeur, de telle manière que chacun ait la juste rémunération de son labeur et que chacun s’engage à dépenser ces salaires dans le commerce, au fur et à mesure, et à ne pas les immobiliser dans d’éventuels placements financiers que proposaient encore les banques de l’époque. Les actionnaires, n’ayant aucun labeur réel dans cette opération (ils se contentaient de toucher des jetons de présence aux Assemblées générales), n’auraient aucun dividende.
- Les amortissements seraient intégrés dans les coûts, à charge pour les entreprises d’effectuer les investissements de remplacement dans le cadre défini ci-dessus.

La D.E.F. chercha quelque temps les entreprises qui acceptaient ces conditions, et finalement en trouva deux, en décidant de se charger elle-même de faire les nœuds aux extrémités des câbles, travail difficile et dangereux s’il en était.
- La société DUFIL qui fabriquait les câbles,
- La Société LETROU qui se chargeait de réaliser les tranchées et de poser les câbles au fond de ses trous.

Et l’on se mit au travail.
Je vous passe les difficultés que rencontrèrent les entreprises pour éviter toute fuite de francass à l’exportation, par exemple lorsqu’elles avaient besoin d’acheter une pelleteuse mécanique, du ciment, ou des ordinateurs, avec la certitude que tous les composants étaient fabriqués en Francassie et que les matières premières qui servaient à les fabriquer ou à les faire fonctionner venaient également de Francassie. Mais il est inutile de rentrer dans ce genre de détail.

Au bout du compte, tous les câbles furent enterrés en une année et la Francassie retrouva ses paysages naturels.

Le grand Argentier mit plusieurs mois à comprendre comment l’enfouissement des câbles n’avait rien coûté à l’État francassien et avait permis une augmentation substantielle de l’activité et par conséquence une diminution importante du chômage qui, à l’époque, frappait durement la Francassie.
Il est vrai que, depuis sa sortie de l’ENA (2), il avait toujours été ministre du Sultan, et chacun sait bien que les ministres sont très peu au courant des véritables réalités économiques...
Mais il y avait, fort heureusement, quelques conseillers qui eux ne venaient pas de l’ENA, dans son ministère. Ils lui donnèrent quelques cours du soir et lui expliquèrent, pas à pas, ce qui s’était passé.

Le Grand Argentier finit par comprendre que toute production de biens réels ne coûte que du travail et des marges imbriqués, les matières premières étant fournies gratuitement par la nature (celle-ci n’ayant pas de compte en banque) et donc que seul coûte, en salaires, le travail pour les extraire ou les transformer.
Que l’argent ne se consomme pas et qu’il circule de mains en mains ! Que les chaînes en cascade représentent des cycles !
Que tant que de la capacité de travail est disponible, l’injection de francass dans l’économie ne coûtait rien à l’État, sous réserve bien sûr qu’il ne doive pas payer de quelconques intérêts sur cette monnaie, fiduciaire ou scripturale, car, en définitive, tout argent donné par l’État revient à l’État.
Les agents de la D.E.F. passèrent, jusqu’à leur dernier jour, les fêtes de fin d’année avec leurs familles, malgré les autres tempêtes océanes dues au dérèglement général du climat sur la Planète, jusqu’à ce que celle-ci reprenne son équilibre au fur et à mesure de la diminution de la pollution et de l’excès d’activité des hommes.
Mais ceci est une autre histoire.

============
1) TVA: Taxe Vraiment Admirable dans la mesure ou elle a réussi à faire que ce soit les entreprises qui soient devenues percepteurs de l'Etat .. mais ceci est un autre débat..
2) ENA: Ecole Nullement Adaptée ... est ce vraiment nécessaire de s'apesantir ? 
===========

Une démontration "mathématique" simplifiée de ce conte, dans lequel j'ai pris l'exemple d'une réalisation d'un ouvrage collectif écologiquement nécessaire ( le ferroutage nord/sud dont le coût estimé était justement, il y a quelques années, de 100 Milliards de francs : désolé, je suis encore en francs ), peut être téléchargée sur: http://www.local.attac.org/13/documents/doc20.pdf (ca fait # 80 Ko). Il s'agit d'un document en support d'une petite intervention locale lors d'un "Café Attac Citoyen(CAC)"
La démonstration complète se trouve pages 117 à 125 sous le titre: " Comment toute création de biens et services commandés par l'Etat ... ne coûte rien à la collectivité si ce n'est du travail, ne nécessite pas d'impôts supplémentaires, induit une activité multiplicatrice et crée des emplois."
Il y est également démontré que sous certaines conditions:
- toute injection par l'Etat, à utilité de travaux collectifs qu'il commande aux entreprises privées, revient intégralement à l'Etat au terme d'un certain nombre de cycles (de l'ordre de 4 à 5 ans)
- que pour une injection de 100 MdF l'activité totale générée s'établit à 420 MdF car les activités secondaires générées ont un effet multiplicateur
- que, toujours pour une injection de 100 MdF, les salaires bruts distribués le sont pour un total de 246 MdF, et donc que le coefficient multiplicateur des salaires est de 2,46.
- Que 246 MdF , pour une moyenne de salaire brut de 150.000 F annuel, représentent ceux de 1.640.000 emplois, qui deviennent pérennes s’il y a injection de 100 MdF de commandes publiques annuelles. Ces emplois supplémentaires permettent soit de diminuer les prestations d’Assedic (donc les charges salariales et patronales), soit d’augmenter les prestations compensatoires envers les laissés-pour-compte de la société.
- Que les charges sociales redistribuables représentent 157 MdF.
Ce que l’on peut y voir aussi, compte tenu de la vitesse annuelle de rotation de la monnaie (actuellement entre 4 et 5) c’est qu’au terme d’une rotation, c’est-à-dire une année, L’État a déjà récupéré 75 % et le total des charges redistribuées a atteint 116 MdF.

Ces démonstrations restent valables quel que soit le bien ou service d’intérêt général, même s’il s’agit d’une bibliothèque municipale, sous réserve que ce soit l’État qui finance (ou rembourse la commune de son « avance de trésorerie », ce qui revient au même).

Conclusions
Les grands et petits travaux, biens collectifs d’utilité publique, présentent des avantages certains :
- Ils procurent les biens d’équipement collectifs, vitaux pour le pays.
- Ils procurent du travail à ceux qui n’en ont pas.
- Ils permettent la création d’activités individuelles secondaires.
- Ils permettraient, en injectant moins de 200 MF, de résorber totalement le chômage et l’exclusion, sous réserve que la main-d’œuvre qualifiée soit disponible.

Cette étude invite aussi à se poser quelques questions fondamentales:
- Pourquoi l’État a t-il abandonné son droit de créer l’argent dont il a besoin, avec pour conséquence qu'il doit donc maintenant couvrir les déficits ( qui correspondent grosso-modo aux intérêts payés) en empruntant sur le marché financier?
- Pourquoi refuse t-il de lancer les grands travaux dont nous avons besoin (ferroutage, enfouissement des lignes électriques, investissement dans la recherche, développement des énergies renouvelables, indépendance logicièle et informatique, etc, et en allant plus loin, l'aide aux PVD sous forme de "plan Marshall")

Je n'ai pas de réponse à ces dernières questions ... Qui nous a mis dans cette "m...e" en négociant le Traité de Maastricht? Quels fonctionnaires, quels "politiques", de quel droit et pour quels avantages personnels (ou simplement par bétise) ? ... et tout cela me rend furieux! 
.
L'État dit "je n'ai pas d'argent", alors qu'il a tout fait pour ne pas en avoir.
L’État dit "je n’ai pas d’argent pour créer de l’emploi ", alors que l’emploi n’en consomme pas,

"Coûter cher" signifie simplement "coûter beaucoup de travail... "
C’est justement l’objectif recherché pour résorber le chômage.

Cordialement

AJH



7. Economie réelle et économie symbolique, Comment la comptabilité a déformé ...


Bonjour

Il importe de bien faire la différence entre L'ÉCONOMIE RÉELLE ET L'ÉCONOMIE SYMBOLIQUE...
J'aurais pu titrer aussi: "Comment la comptabilité a déformé ce qui était simple!"

L’économie réelle est celle des biens matériels et des ressources naturelles.
L’économie symbolique est celle de la valeur des choses, des cours (matières premières, monnaies...), de l’argent.
Les richesses réelles sont concrètes, ce sont toujours des biens matériels. Leur représentation symbolique est toujours abstraite et s’exprime en unités monétaires.
Nous regarderons leurs différences grâce à deux courtes histoires :

Histoire 1: Les dix commerçants
Dans une petite ville, dix commerçants vivaient en bonne intelligence. Tous réalisaient un bénéfice de 25 % sur chaque vente. Un beau matin, l’un d’eux reçoit la visite d’un client qui lui achète un objet de 1000 F contre deux beaux billets de 500 F tout neufs. Heureux de cette aubaine, notre commerçant décide d’acquérir un objet de même valeur, qu’il convoitait depuis longtemps chez son voisin sans pouvoir l’acheter ; il lui remet les 2 billets. Le deuxième commerçant en use de même avec le troisième ; et ainsi de suite jusqu’au dixième.
Bonne journée pour tous. Ils ont enregistré un honnête gain de 25 %, soit 250 F chacun. Hélas, le lendemain, il faut déchanter, les billets étaient faux. Nos neuf commerçants, mus par un sentiment de solidarité, s’accordent pour verser au dernier, qui a donc gardé les billets, les 2/5 de leur bénéfice, soit : 100 F x 9 = 900 F.
Ainsi, tous sont payés. Et il reste à chacun un bénéfice de 150 F issu des deux faux billets. Du point de vue comptable, l’opération est impeccable. Tout le monde est satisfait, le percepteur et les volés presque autant que le voleur.

Moralité de cette histoire : L’ensemble des commerçants a été dépossédé d’une valeur matérielle, emportée sans paiement par un escroc, mais cette opération augmente leur bénéfice comptable.

Il est à noter que si ces faux billets avaient circulé 100 fois (au lieu de 10), c’est 10 fois plus de bénéfices comptables qui auraient été réalisés... et on revient au fait que l’injection de monnaie (vraie de préférence) dans un système économique, génère une activité multiplicatrice, cette activité étant également multipliée si la « vitesse de rotation » de l’argent augmente (l’argent qui tourne génère de l’activité et de l’emploi, l’argent stocké dans un bas de laine n’en génère pas).
Le problème (l’astuce ?) de cet apologue des 10 commerçants est que, dans la réalité de notre monde, le dernier escroqué (celui qui s’aperçoit que les billets sont faux) est le seul qui en est de sa poche, car, dans cette même réalité les différents intervenants (commerçants) antérieurs ne se grouperont sûrement pas pour partager leurs bénéfices, même s’ils ont été réalisés par circulation de fausse monnaie... Mais, je répète, il ne s’agit que d’un apologue...


Histoire 2: Les Valbans et les Mélans
Il était une fois deux pays, la Mélanie et la Valbanie, qui vivaient en bonne intelligence. Les Mélans produisaient beaucoup de blé, quelque mille tonnes de plus que leur consommation. Mais ils manquaient fortement de briques pour la construction. Or, quand elles tournaient à plein régime, les fabriques valbanes de briques en produisaient quelque mille tonnes en excédent. Mais tout s’arrangeait parce que les Valbans étaient friands du blé importé de Mélanie.
Curieusement, les prix de revient du blé et des briques étaient identiques : 100 piastres la tonne.
Pour prendre une juste mesure de la qualité des relations qui s’étaient nouées entre les divers producteurs de chaque pays et les divers importateurs de l’autre, il faut savoir qu’en ce temps-là, la conjoncture était bonne et les prix stables : jour après jour la cotation du blé et celle des briques se maintenaient à 100 piastres la tonne.
C’est ainsi que les briques servaient de fret de retour aux navires apportant en Valbanie un blé très apprécié par sa population.

La réalité matérielle est favorable : les producteurs des deux pays enrichissent leurs collectivités de biens matériels et les échangent rationnellement.
Un observateur naïf, n’ayant pas subi de formation classique, serait tenté d’assimiler ces transactions à du troc. "Ces affaires-là, penserait-il, sont sages et bonnes puisqu’elles satisfont aux intérêts des deux parties, qui se défont de leurs surplus pour acquérir des produits qui leur manquent."

Mais voici qu’à la suite d’un événement extérieur, la conjoncture mondiale se détériore. Les cours du blé et des briques s’effondrent. Chacun baisse de moitié et c’est la catastrophe économique. Le troc serait resté identique mais les producteurs de blé et les fabricants de briques déposent leurs bilans, faute de pouvoir supporter une perte de 40.000 piastres. Les échanges cessent aussitôt, au grand dam des habitants des deux pays amis.

Moralité à ce supplément de la fable : C’est la comptabilité qui a déguisé cette réalité en calamité financière, qui n’aurait eu sans cela aucune incidence pratique pour les deux producteurs.

Deux déductions s’imposent :
La première : Il y a deux sortes de biens :
- les biens réels (matériels, concrets) : ce sont par exemple : une récolte de pommes, l’achat d’un appareil photo, l’audition d’un concert. En somme : « tout bien ou service dont on peut profiter ».
- les biens financiers (symboliques) : ce sont par exemple le produit de la vente des pommes ou de l’appareil photo ainsi que la recette du concert. C’est la quantité d’argent que reçoit le vendeur. Il s’agit de « l’image des ventes réelles ».

La seconde : Il n’y a pas nécessairement concordance entre ces deux biens. Il peut même y avoir opposition entre eux. En effet :
- il est possible d’enrichir la collectivité en perdant à titre individuel (fabriquer des produits appréciés par ses clients et devoir déposer le bilan car on n’est pas rentable face à une concurrence externe ou sauvage).
- il est aussi possible d’appauvrir la collectivité en gagnant à titre individuel (détruire une partie de sa production pour maintenir les cours).

Finalement :
=> L’économie traditionnelle ne mesure que des représentations symboliques (prix de revient, chiffre d’affaires, taux de rentabilité...).
=> L’économie traditionnelle ne se préoccupe pas des richesses réelles produites par l’action des hommes pour répondre à leurs besoins ou à leurs désirs. Elle ne se préoccupe pas non plus des avantages ou des dangers de ces productions.
Pour paraphraser Korzybski, l’économie traditionnelle oublie que « le mot n’est pas la chose », ou bien que « la carte n’est pas le territoire ». De même, la comptabilité n’est pas l’entreprise.
La confusion entre ces deux notions justifie par exemple :
-la mise en jachères, l’existence de quotas, la destruction des surplus... dans le seul but de maintenir les cours.
-le maintien de la fabrication de produits dangereux (amiante, sang contaminé, drogue...) ou la génération de pollution (rejet dans l’air ou dans l’eau) pour des raisons de rentabilité financière


Note: Réflexion « utopique » d’une régulation douanière simple : « La régulation semi-automatique des échanges internationaux »

Voici, simplifié à l’extrême, un schéma de « régulation douanière bivalente » dont résulterait, entre les nations qui l’adopteraient, un marché non pas « commun » comme celui dont nous subissons les agressions anarchiques, mais « solidaire ».
Supposons trois nations (ou nations groupées, tels l’EEC ou les USA), A, B, et C, soucieuses d’établir entre elles un marché solidaire équilibré par les mécanismes d’une régulation douanière bivalente. Elles commencent par confier à des statisticiens le soin de calculer les tarifs douaniers propres à réaliser, au départ, un équilibre approximatif. Une étude des trois marchés en cause conduit aux constatations suivantes : les prix sont de 100 chez A, 125 chez B, 150 chez C, comptés en même unité.
Ces données statistiques acquises, la solution du problème relève de l’arithmétique la plus simple : il s’agit d’élever de 25 % et 50 % les marchandises produites par A lorsqu’elles franchissent les frontières de B et de C, et d’abaisser à 100 le prix des marchandises qui font le chemin inverse. Les recettes douanières encaissées par B et par C sont affectées à cet usage. Les « prix exportation » de ces deux pays étant ramenés à 100, le même tarif douanier reste applicable aux échanges entre eux.
Ce mécanisme suffirait à équilibrer inviolablement les échanges entre les trois pays en cause. L’organisation d’un marché solidaire accessible à deux nations, à dix nations ou à toutes les nations du monde libre ne présenterait guère de difficultés théoriques ni pratiques. Chaque nation établirait elle-même son tarif douanier en fonction de ses vocations économiques particulières, sans abandonner la moindre parcelle de sa souveraineté.
Bien entendu, le présent schéma est abusivement simplifié. Les difficultés de sa réalisation pratique sont, en matière de détails, passablement nombreuses, notamment sur le plan juridique.
Des traités de toutes sortes semblent y opposer toutes sortes d’obstacles, mais aucun n’est insurmontable ni même très sérieux. Au demeurant, ce moyen d’obtenir l’équilibre des échanges internationaux n’en est guère qu’un parmi beaucoup d’autres. En le décrivant sommairement, l’objectif poursuivi est de montrer que des moyens fort simples peuvent suffire à résoudre des problèmes réputés insolubles.

Cordialement

AJH



8. Les évolutions génératrices de la crise


Bonjour

Voyons les quatre évolutions génératrices de la crise "structurelle"

Les évolutions technologiques : les machines peuvent remplacer l’homme.

Si une production de 1000 E a été faite pour 800 E par des hommes et pour 200 E par des machines, cette production n’a distribué au maximum que 800 E de pouvoir d’achat.
Mais avec 800 E on ne peut acheter la production que pour 800 E et non pas pour 1000 E car les machines n’ont pas de pouvoir d’achat. Le manque de pouvoir d’achat entraîne donc la chute des prix, ce qui oblige encore à accroître la rentabilité donc à remplacer des hommes par des machines.
C’est une spirale sans fin. De plus, pour maintenir les cours, il y a parfois destruction des surplus dans un monde qui a faim.

Les évolutions commerciales : le libre-échange est sans régulation.

Dans ce cas c’est une concurrence sauvage qui impose une recherche effrénée de rentabilité.
L’écoulement des biens et des capitaux est fluidifié par la suppression des frontières et ainsi il n’y a plus de coupe-feu. Les salaires de misère pratiqués en Extrême-Orient tirent les prix vers le bas et motivent les délocalisations.
Les prix baissent, les revenus diminuent, le chômage et l’exclusion s’amplifient.

Les évolutions financières : les taux de change flottants induisent la spéculation.

L’argent est maintenant une marchandise qui se vend et s’achète !
Les taux de change sont déterminés par les flux financiers internationaux (environ 1.000 milliards d'euros par jour), 50 fois supérieurs aux échanges commerciaux qui ne représentent que 2 %.
Le rôle régulateur des marchés est devenu un mythe. L’argent ainsi « gagné » par des jeux financiers spéculatifs et improductifs vient enrichir la sphère financière et il est soustrait au monde économique des échanges.

Les évolutions monétaires

Les États ont abdiqué leur droit de créer leur monnaie ; ils empruntent au « marché » pour financer leurs déficits.
Ainsi, tout développement économique avec accroissement de richesses réelles se traduit par une augmentation des dettes, donc une augmentation des intérêts à payer. Les impôts ne peuvent qu’augmenter alors que les gains de productivité devraient les faire diminuer, et de plus ils sont alourdis encore plus par le « remboursement » de la dette sociale.

• • •

LES CONSÉQUENCES de chacune de ces quatre évolutions majeures conduisent à une diminution régulière du pouvoir d’achat distribué.

LA RÉSULTANTE conduit à la situation suivante : des porte-monnaie vides devant des magasins pleins.

=> En continuant à ne rechercher que la rentabilité immédiate, le système économique génère la misère dans l’abondance.

Le problème est d’ordre monétaire

=> Il y a chômage parce qu’il y a pénurie de monnaie et insuffisance de pouvoir d’achat.
Toutes les mesures prises pour aider l’emploi ont été sans effet autrement qu’à la marge ; elles n‘ont pas pris en compte l’aspect monétaire neutralisé dans les théories économiques libérales (voile de la monnaie) et elles n’ont eu pour but que d’aider la production, comme si nous étions encore en période de pénurie.

Cordialement

AJH



9. L’anémie monétaire du circuit économique est bien la cause essentielle du chômage


Bonjour

Il est intéressant d'établir les relations entre M1, P.I.B. et taux de chômage afin d'essayer de démontrer que l’insuffisance de la masse monétaire est la cause de ce taux de chômage.

Avant tout, quelques précisions d’ordre général en ce qui concerne les « masses monétaires ».

Il existe quatre « agrégats » monétaires qui s’emboîtent les uns dans les autres :
M1, regroupe tous les moyens de paiement, billets, pièces, dépôts à vue (c’est-à-dire la monnaie scripturale). En résumé c’est M1 qu’on appelle la masse monétaire et elle comprend la monnaie fiduciaire (billets et pièces) ainsi que la monnaie scripturale (dépôts à vue).
M2, regroupe M1 et la quasi-monnaie, c’est-à-dire les comptes sur livrets que l’on peut liquéfier sur-le-champ.
M3, regroupe M2 et tous les avoirs à court terme gérés par les banques (Sicav, Fonds communs).
M4, regroupe M3 et les titres négociables à court terme émis par le Trésor (Bons du Trésor) et par les institutions non bancaires (Crédit Foncier, Caisse des Marchés de l’État).

L’agrégat M4 est maintenant supprimé dans les bilans de la BCE, et se trouve inclus dans M3.
M2 et M3 sont des « ensembles vides ». Il n’y a de monnaie que dans M1 car la comptabilité de ces agrégats M2, M3 ne représente que des « transits » ; comme le disent les économistes, ce sont des « bulles monétaires ». Nous ajoutons que leur caractéristique est qu’elles sont vides.
Contentons-nous de vous laisser voir les relations existantes entre M1 (masse monétaire en circulation), le PIB et le taux de chômage...

Constatation des évolutions de M1, du PIB, du chômage

Dans le tableau qui suit, les trois colonnes de droite représentent des « possibilités » à partir des données des colonnes M1, PIB, Vitesse de rotation de M1 et pourcentage de chômage

La vitesse de rotation est le nombre de "circuits" que réalise la monnaie en un an, de quoi produire le PIB. Elle ne se "décrète" pas, c’est juste une donnée qui est une observable à postériori et sur laquelle les pouvoirs publics ne peuvent avoir aucune prise, sauf à créer un impôt sur la thésaurisation (thèse de Gesell).

Pour que mon tableau "tienne" sur le forum, j'ai été obligé de rajouter des zéro devant les chiffres... mais au cas ou, après l'année (de 5 en 5), vous avez les éléments suivants: M1 | PIB | Vitesse de rotation de M1 | % de chômage | PIB possible avec chômage = 0 | M1 souhaitable en gardant la même vitesse de rotation | Insuffisance de M1

Année

M1

PIB en Mds Frs

Vr(M1)

%(chômage)

PIB possible, chômage=0

M1 souhaitable, Vr(M1)=cte

Insuffisance de M1

2000

2481,0

9216

3,7

09,9 %

10128

2737

256

1995

1823,0

7675

4,2

11,6 %

08690

2064

241

1990

1685,2

6509

3,9

08,9 %

07150

1851

166

1985

1301,6

4700

3,6

10,2 %

05242

1452

150

1980

0678,4

2808

4,1

06,3 %

03001

0725

047

1975

0426,5

1468

3,4

04,1 %

01531

0445

018

1970

0234,2

0794

3,4

02,5 %

00814

0240

006

1965

0177,2

0483

2,7

01,5 %

00491

0180

003

1960

0095,8

0297

3,1

01,4 %

00301

0097

001


Pour 2000, le PIB a été de 9216 Milliards de francs. Il aurait été de 10128 Milliards de francs si tous les chômeurs avaient travaillé [9216 x 109,9 % ]. Mais dans ce cas la masse monétaire aurait dû être de 2737 milliards de francs en conservant la vitesse de rotation de 3,7 (calculée par le quotient PIB divisé par M1).

L’augmentation à #4,1 de la vitesse de rotation de la monnaie aurait le même effet puisque dans ce cas une masse monétaire de 2481, qui "tourne " 4,1 fois dans l'année, aurait produit 10172 milliards de F de PIB…

À vitesse constante de rotation de la monnaie (3,7), il aurait donc fallu (en 2000) un excédent de masse monétaire de 256 milliards de francs pour assurer le plein emploi. Et la surprise est de constater que cela représente quasiment l’intérêt de la dette nationale, somme prélevée dans le monde réel économique pour enrichir le monde symbolique, financier.

Nous voyons bien que dans les années 60 à 70 "l'insuffisance de M1" était très faible ... et que le taux de chomage l'était également .. la dégradation a commencé en 1975 pour atteindre des sommets à partir de 1985, année où l'écart entre la masse monétaire réelle et la masse monétaire souhaitable a été de 150

L’anémie monétaire du circuit économique est bien la cause essentielle du chômage

Nous allons essayer de démontrer l’affirmation que l’anémie monétaire est la cause essentielle du chômage
Un petit calcul simple va l’illustrer. Soit :
N = la population totale du pays
a = le pourcentage des actifs dans le pays
t = le taux de chômage
q = la production moyenne par actif au travail

Relation entre chômage et monnaie en circulation

Allez, courage, un peu d’algèbre... L’équation générale des transactions utilisée par Irving FISHER, dès 1894, relie la production vendue PV à la masse monétaire M en circulation et à la vitesse de circulation v de la monnaie : PV = M x v
La production totale PT du pays est :
PT = q x (N x a) x (1- t) [La production totale d’un pays est égale à la production moyenne par actif multiplié par le nombre d’actifs.]. Ceci semble assez évident... Ils sont compliqués ces économistes !
Toute la production est vendue si PV = PT,
donc, si M x v = q x (N x a) x (1 - t) [… si la Masse monétaire multipliée par la vitesse de rotation de la monnaie est égale à la production totale d’un pays...]
En extrayant le terme « t » (taux de chômage), on obtient la relation :
t = 1 - [(M x v) / (q x N x a)] […. le taux de chômage est égal à 100 % diminué de la masse monétaire multiplié par la vitesse de rotation de celle-ci, ce dernier terme divisé par la production moyenne par actif, ou, dit autrement : le taux de chômage est égal à 100 % diminué de la production vendue divisé de la production moyenne par actif.]

=> Donc, si la masse monétaire est égale à zéro ou bien que la vitesse de rotation de la monnaie est nulle, le taux de chômage est égal à 1 soit 100 %.
=> Donc, si la masse monétaire qui circule [représentée par (M x v)], reflète exactement la production, on a (M x v = q x N x a) et le taux de chômage est nul (t = 1 - 1 = 0).
=> Donc, il est illusoire d’espérer réduire le chômage sans une injection de monnaie suffisante.

A ceci je rajoute que quand je parle "d'injection de monnaie", je veux parler de la monnaie permanente, et non de monnaie temporaire issue des demandes de crédit et "productrice" d'intérêts (monnaie payante)...

Et pour répondre tout de suite à l'objection habituelle de ceux qui, entendant parler d'injection monétaire, pensent immédiatement "planche à billet"... non! l'injection de monnaie n'est pas inflationniste à deux conditions:
- capacités productives inemployées (en équipement et en hommes, c'est-à-dire jusqu'à un chômage plancher que les économistes estiment à 2%)
- elle doit être concommitante avec la production .. augmentée en même temps que la production augmente, diminuée si la production diminue, de telle manière que la monnaie en circulation permette d'acheter la production..

Cordialement
AJH



10. Le saviez-vous ?


Bonjour

Juste quelques chiffres pour réfléchir .. on reprendra quelques explications demain 

Saviez-vous que?

Les gouvernements autour de la planète consacrent 1.000 milliards de dollars américains à la défense, tandis qu'ils dépensent seulement 50 milliards de dollars pour le développement.

En pleine guerre du vietnam, les américains ont dépensé jusqu'à 8 milliards de dollars par jour pour maintenir leur armée dans cette région. Ce fut d'ailleurs une période d'abondance matérielle et financière sans précédent pour les américains...
Plus proche de nous, la guerre actuelle: Coût de la guerre en Irak (compteur)
Quand je l'ai pris (23 juillet 2004) c'était environ 124 milliards de dollars.


On peut donc réfléchir à cette question:
Quelle différence cela ferait-il pour l'économie américaine si au lieu de bombes ils avaient "parachuté" (c'est une image, évidemment) de l'outillage agricole, des réfrigérateurs, des écoles et du matériel hospitalier?
S'ils avaient proposé ce plan, ne croyez-vous pas que la coalition aurait été beaucoup plus étoffée ?

Saviez-vous également que:

*En 1960, les 20 % de la population mondiale vivant dans les pays les plus riches avaient un revenu 30 fois supérieur à celui des 20 % les plus pauvres.
... alors que, en 1995, il était de 82 fois supérieur, et que dans plus de 70 pays, le revenu par habitant est inférieur à ce qu'il était il y a vingt ans, et que près de 3 milliards de personnes - la moitié de l'humanité - vivent avec moins de 2 euros par jour.

* Les 3 personnes les plus riches du monde possèdent une fortune personnelle de 200 milliards d'euros
... alors que le PIB cumulé des 48 pays les plus pauvres, le quart des États du monde, est inférieur à ce montant.

* Le plus riche, Bill Gates, a triplé sa fortune personnelle en 3 ans. Elle est maintenant de plus de 100 milliards d'euros...
... alors que 70 pays les plus pauvres se sont encore plus appauvris et que 100 francs permettent à une famille malgache ou africaine de manger pendant un mois

*Les 200 personnes les plus riches détiennent 1000 milliards d'euros en capital personnel.
Un prélèvement sur le capital de moins de 4% annuel suffirait pour donner à toute la population du globe l'accès aux besoins de base.......
... alors que le budget annuel de l'UNESCO, en faveur d'1,8 milliards d'enfants en difficulté dans le monde, est 100 fois plus faible.

* Si on estime les revenus des 200 personnes les plus riches à seulement 7% de leur capital, ces revenus représentent plus de 70 milliards d'euros par an. ...
... alors que, avec ces 70 milliards annuels on peut nourrir 400 millions de personnes affamées...

* L'ensemble des salaires versés en France annuellement est de 400 milliards d'euros , mais à elles seules, les transactions spéculatives sur les monnaies (et elles ne sont en aucune façon ni productives, ni taxées) représentent dans les "mauvais jours" 1000 milliards d'euros par jour ...
... alors que taxées à seulement 0,1% (Taxe Tobin), elles fourniraient des recettes d'environ 360 milliards d'euros par an. Partagée entre les pays collecteurs et un fond à destination des pays pauvres, les pays collecteurs augmenteront leurs capacités d'investissements collectifs et les pays pauvres verront la faim et d'autres maux disparaître en quelques années.

* La Citibank, en spéculant sur les devises au cours du seul premier semestre 98, a réalisé un bénéfice de 0,5 milliards d'euros, avec 350 employés...
... alors que dans le même temps les 140 000 employés de Peugeot ne permettaient à l'entreprise que de dégager un bénéfice sensiblement équivalent.

... alors que des 4,5 milliards d'habitants que comptent les pays en voie de développement, près d'un tiers n'ont pas accès à l'eau potable, un cinquième des enfants n'absorbent pas suffisamment de calories ou de protéines bien que les disponibilités permettent à chacun des 6 milliards d'habitants de la planète de disposer d'au moins 2700 calories par jour. Encore faut-il qu'ils puissent être achetés par les groupes humains qui en ont besoin..
... alors que 2 milliards d'individus - le tiers de l'humanité - souffrent d'anémie, que 800 millions de personnes souffrent de sous-alimentation chronique et que chaque jour 100000 personnes, dont 20000 à 30000 enfants, meurent de faim.

Il n'est bien évidemment pas question de se culpabiliser en permanence... mais il ne faut pas oublier ces chiffres.

Cordialement

AJH



11. Reconsidérer la richesse !


Bonjour

De nouveaux éléments de réflexion qui complètent les 10 précédents, pour vous aider à changer votre point de vue sur l'économie ...

L'introduction du rapport "Reconsidérer la richesse" réalisé par Patrick VIVERET, Conseiller référendaire à la Cour des Comptes, en janvier 2002, commence par ces paragraphes:

''Nous avons la preuve permanente que notre représentation actuelle de la richesse, et l'usage contre-productif que nous faisons de la monnaie, aggrave les problèmes auxquelles nos sociétés sont confrontées au lieu de nous aider à les résoudre. Dans la plupart des dossiers qui ont été au cœur des débats publics de ces derniers mois, de la vache folle à l'Erika, de l'amiante aux accidents de la route, des conséquences de la grande tempête de décembre 1999 à la crise des carburants de l'automne 2000, il y a toujours un élément commun que l'on oublie curieusement de rappeler : ces catastrophes sont des bénédictions pour notre Produit Intérieur Brut , ce chiffre magique dont la progression s'exprime par un mot qui résume à lui seul la grande ambition de nos sociétés matériellement développées et éthiquement sous développées : LA CROISSANCE !

Plus de destructions = plus de PIB
Car les centaines de milliards que coûtent à la collectivité ces destructions humaines et environnementales ne sont pas comptabilisées comme des destructions mais comme des apports de richesse dans la mesure où elles génèrent des activités économiques exprimées en monnaie. A supposer que nous n'ayons aucun accident matériel ou corporel, ni morts ni blessés sur les routes de France l'année prochaine, notre PIB baisserait de manière significative, la France perdrait une ou plusieurs places dans le classement des puissances économiques et l'on verrait nombre d' économistes nous annoncer d'un ton grave que la crise est de retour.

Les activités bénévoles font baisser le PIB
Dans le même temps, toutes les activités bénévoles qui, grâce en particulier aux associations loi 1901, dont nous nous apprêtons à fêter le centenaire, ont permis d'éviter ou de limiter une partie des effets de ces catastrophes, par exemple en allant nettoyer les plages polluées ou en aidant gratuitement des handicapés, n'ont, elles, permis aucune progression de richesse et ont même contribué à faire baisser le produit intérieur brut en développant des activités bénévoles plutôt que rémunérées. Autant dire que nous marchons sur la tête et que dans le même temps où l'on va célébrer le rôle éminent des associations, nous continuerons à les traiter comptablement, non comme des productrices de richesses sociales mais comme des "ponctionneuses de richesse économiques" au titre des subventions qu'elles reçoivent.

Il est temps de changer de représentation
Il est donc plus que temps de nous atteler à ce chantier considérable du changement de représentation de la richesse et de la fonction que joue la monnaie dans nos sociétés. Définir l'évaluation comme une délibération sur les valeurs, La question des "indicateurs" qui relève des outils ne peut donc être dissociée de celle des "critères" qui relève du débat sur les fins. "Oui à l'économie de marché, non à la société de marché" Il s'agit, on l'a compris, de retrouver, à l'aube de ce siècle, la force originelle du principe associatif , celle qui cherche, à travers et au delà l'économie, à substituer la logique coopérative des jeux gagnants/gagnants à la logique guerrière des jeux gagnants/perdants. "

Les indicateurs de développement humain
La philosophie générale des "rapports mondiaux sur le développement humain" vise à rétablir le lien entre l'économie et l'éthique à rebours du mouvement historique que nous avons relaté dans la première partie de ce rapport. Ils sont nourris, depuis 1990, par un indicateur composite, l'IDH, indicateur de développement humain .

L'introduction du rapport de 1996 situe bien la triple perspective du projet : (*PNUD, Rapport mondial sur le développement humain, 1996.)
- "le développement humain est une fin dont la croissance économique est le moyen";
- " les dernières décennies montrent on ne peut plus clairement qu'il n'existe pas automatiquement de lien entre croissance économique et développement humain";
- " il importe de consacrer davantage d'attention à la qualité de cette croissance afin de s'assurer qu'elle accompagne les objectifs que sont le développement humain, la réduction de la pauvreté, la protection de l'environnement et la viabilité à long terme du développement''

Nous sommes, on le voit, d'emblée sur le terrain d'une recherche qui place au premier plan les deux richesses fondamentales oubliées par l'économie dominante : les humains et leur environnement naturel. C'est pourquoi, note le rapport, "les biens ne doivent pas être valorisés intrinsèquement, mais considérés comme les instruments de la réalisation de certaines potentialités telles que la santé, la connaissance, l'estime de soi et l'aptitude à participer activement à la vie de la communauté"


Les 10 poncifs sur la richesse; extraits de ce rapport

1. Le PIB est un bon indicateur de la richesse créée.

De la vache folle à l'Erika, de la tempête de décembre 1999 aux accidents de la route ou à l'explosion de l'usine AZF à Toulouse : toutes ces catastrophes sont des bénédictions pour notre produit intérieur brut ! Les centaines de milliards de francs qu'elles coûtent à la collectivité ne sont pas comptabilisées comme des destructions, mais comme des créations de richesse : dès lors qu'il faut payer des garagistes pour réparer les voitures endommagées, des cimentiers pour brûler les farines animales ou des médecins pour soigner les victimes de la pollution, des valeurs ajoutées monétaires sont enregistrées dans les comptes. Ce qui contribue à gonfler le PIB (produit intérieur brut).


2. Seules les entreprises produisent de la richesse

Notre système économique repose sur la stricte séparation entre, d'un côté, des entreprises considérées comme seules productrices de richesse et, de l'autre, des activités sociales et écologiques financées par prélèvement sur cette richesse. Un tel mythe condamne les associations à quémander leurs moyens d'existence à l'État ou à les rechercher sur le marché, faute de disposer de ressources directement liées aux richesses sociales qu'elles contribuent à créer ou à préserver. En termes de comptabilité nationale, les associations concourent à faire baisser le PIB en développant des activités bénévoles plutôt que rémunérées. Ce système pervers fait des services publics un secteur suspecté en permanence de parasitisme.


3. Les indicateurs de productivité de l'ère industrielle sont toujours valables

Nous disposons d'outils de mesure de la productivité forgés pour favoriser une croissance matérielle de nature industrielle. Ceux-ci s'avèrent largement contre-productifs lorsqu'il s'agit d'affronter les trois grands défis de l'avenir : entrée dans l'ère informationnelle, enjeux écologiques, rôle des services relationnels (éducation, santé…) dans notre développement. Ainsi, en matière de santé, ce qui compte n'est pas le nombre de visites chez le médecin, mais le fait de savoir si l'on est guéri ou, mieux, si l'on échappe à tel ou tel risque. Or, dans la comptabilité actuelle, plus on fait de prévention, plus on casse la croissance (puisqu'on consomme moins de médicaments et d'heures d'hospitalisation) !


4. La monnaie sert d'abord à faciliter l'échange

Exact, mais pour une part seulement. Le mot "payer" vient du latin pacare, qui signifie pacifier et Montesquieu a développé une théorie du " doux commerce " comme alternative à la guerre. Mais, si la monnaie remplit cette fonction lorsqu'elle facilite l'échange entre partenaires, elle devient facteur de violence quand elle se fait outil de domination d'un capitalisme relevant plus de la volonté de puissance que du désir d'échange. Que des personnes désireuses d'échanger et de créer des activités ne puissent le faire au motif qu'elles sont insolvables est en contradiction avec la théorie de la monnaie comme outil d'échange.


5. L'argent reste le fondement de tout système d'échange

Le système d'échange le plus universel entre les êtres humains est en réalité celui du temps. Celui-ci remplit d'autant mieux les rôles d'unité de compte et de moyen d'échange traditionnellement dévolus à la monnaie que ses unités (heures, minutes, secondes) ont l'avantage, contrairement à l'argent, d'être universellement reconnues et invariables. Bref, ce qu'on appelle l'argent, et qui n'est en fait que la " monnaie de marché ", n'est qu'un cas particulier de l'échange de temps. Il serait plus judicieux de dire que " l'argent, c'est du temps " plutôt que " le temps, c'est de l'argent ".


6. C'est la rareté qui fait la vraie valeur d'un bien

Nous définissons la valeur, au sens économique, par la rareté. Mais cette intuition devient fausse lorsqu'elle dénie toute valeur à des biens non rares mais dont la perte serait irréparable : l'air est abondant et gratuit, mais sa disparition condamnerait l'espèce humaine. Ce qui montre que la valeur marchande est un sous-ensemble d'un système de valeurs plus élevé, dont il suffit de simuler la perte pour découvrir l'importance.


7. Les ressources planétaires sont insuffisantes pour satisfaire tous les besoins

La guerre économique actuelle, que l'on nous présente comme liée à des logiques de rareté et de survie, se situe dans un contexte où les besoins fondamentaux des six milliards d'êtres humains peuvent être satisfaits. Les chiffres du Pnud (Programme des Nations unies pour le développement) sont éloquents : il faudrait environ 40 milliards de dollars par an pour éradiquer la faim, permettre l'accès à l'eau potable pour tous, pour les loger décemment et combattre les grandes épidémies. Soit dix fois moins que pour les dépenses mondiales de publicité !


8. L'économie est née de la nécessité d'affecter des ressources rares

Dans la plupart des cas, ce n'est pas la rareté mais l'abondance qui caractérise la nature : que l'on pense à l'abondance des espèces, des cellules et, de manière générale, à la formidable profusion dont témoigne le phénomène de la vie… Loin que l'économie apparaisse comme l'activité de base, condition de toute survie, elle est beaucoup plus, à partir de sa réinvention moderne au xixe siècle, l'idéologie dominante de la société industrielle.


9. L'économie joue un rôle central dans toutes les sociétés humaines

S'il est un trait commun à la plupart des civilisations, c'est la subordination du travail, de la production et, plus largement, de la sphère économique à des activités ou des valeurs jugées plus fondamentales comme la politique, la culture, la philosophie. Même Adam Smith, le père de notre économie politique, estimait que le vrai rôle de l'économie était, en organisant l'abondance, de réunir les conditions pour construire ensuite une " république philosophique ". Quant à Keynes, il considérait que l'économie devrait occuper, à terme, une place réduite dans l'activité sociale et les économistes accepter que leur rôle ne soit pas plus important que celui des " dentistes ".


10. Il n'y a pas d'alternative au plan international sur ces questions

Dès aujourd'hui, on peut s'appuyer sur un courant de recherche international pour faciliter la transformation de nos systèmes de représentation de la richesse. En témoignent les indicateurs de développement humain et de pauvreté élaborés par le Pnud, ceux de l'Union européenne sur des indicateurs environnementaux et sociaux, le débat récent sur la " responsabilité sociale de l'entreprise " et même certaines études de la Banque mondiale et de l'OCDE sur " le capital social " et le " capital naturel ". Enfin et surtout, l'exigence croissante de la société civile mondiale pousse les acteurs institutionnels et économiques à bouger sur cette question : la rencontre de Québec " globaliser la solidarité ", organisée par les acteurs de l'économie sociale et solidaire, et le Forum social mondial de Porto Alegre ont tous inscrit la reconsidération de la richesse à leur ordre du jour. Du coup, il devient difficile d'arguer du fait que la France ne saurait s'engager seule dans une stratégie de transformation pour justifier l'immobilisme.
Hors des circuits commerciaux et financiers traditionnels, des réseaux informels de solidarité se mettent en place dans nombre de pays. Loin d'être négligeable, leur action est aujourd'hui prise en compte par les autorités.

Cordialement

AJH



12. Épistémologie économique : changer les paradigmes de l'économie


Bonjour

Épistémologie économique - Réflexion inspiré d’une publication de Daniel Favre et Philippe Foucou (symposium écrit, 9° livraison, août 1995, Institut de la Méthode, Bienne – CH)

Qu’est ce que l’épistémologie ?

La définition d’Éric Schwarz est la suivante : « L’épistémologie étudie les méthodes, les outils, les présupposés de la science, le non-dit, ce qui va de soi, ce que tout le monde fait sans se poser de question, bref, ce qu’on tient pour vrai »

Les problèmes économiques : problèmes d'économie ou problèmes d'épistémologie?

Les médecins et les physiologistes qui ont refusé collectivement pendant plus de 100 ans la théorie d'Harvey sur la circulation sanguine présentaient-ils tous un déficit intellectuel majeur pendant toute cette période ?. … non, évidemment pas . Seulement, un changement de paradigme nécessite le plus souvent de surmonter des obstacles épistémologiques qui désignent « des représentations induites en particulier par les expériences premières que nous avons associé à un concept » (Bachelard). Cette notion d'obstacle permet de comprendre les raisons de l’exemple de la circulation sanguine. Face à un changement de paradigme, les partisans d’un ancien paradigme ne sont pas sensibles aux caractéristiques d’un nouveau ni aux démonstrations qui réfutent l'ancien.

Les effets des dysfonctionnements économiques actuels, qui contribuent à plonger notre société dans le désarroi, ont autant une origine épistémologique qu’économique, car les applications du dogme des théories économiques actuelles sont toutes fondées sur la gestion des ressources rares ( Voir l'article: Pénurie et abondance ) .

Ce paradigme actuel nous propose quatre choix pour assurer notre « perdition » :

- soit par l’augmentation sans fin du chômage
- soit par l’augmentation de l’inflation
- soit par l’augmentation du déficit budgétaire
- soit par l’augmentation du déficit extérieur.
… la guerre étant la seule solution trouvée à ce jour pour permettre à l’économie de dépasser ces contradictions

Or, le concept de la monnaie a évolué et s’est transformé au cours des siècles, des coquillages à l’or, pour aboutir à une totale dématérialisation (depuis 1978) qui a pour conséquence qu’aucune monnaie n’a de contrepartie en matières précieuses ou rares.

Or, si une collectivité a
1 – un besoin,
2 – la volonté de le satisfaire,
3 – les moyens techniques et énergétiques,
4 – Un excès de main d’œuvre et le savoir-faire,
… Pourquoi ne peut-elle réaliser ce besoin par faute de financement ?

L’obstacle épistémologique est le suivant :

La monnaie reste conçue comme une réalité matérielle (précieuse) de quantité finie donc rare et épuisable, alors qu’elle ne l’est plus puisqu’elle est dématérialisée et qu’un nouveau paradigme devrait pouvoir être assimilé. Ce nouveau paradigme, c’est celui dans lequel :
1 - Aucune loi physique n’empêche un État, une Banque Centrale ou de second rang de créer toute la monnaie nécessaire. Ne pas le faire est la conséquence d’actes volontaires, de lois humaines.

2 - Contrairement à l’ancienne prémisse (ressources rares), le nouveau est : comment écouler nos surplus pour mieux satisfaire nos désirs et nos besoins dans le respect de l’écologie planétaire ( abondance permise par le progrès technologique)

3 - La création monétaire peut être ajustée de telle manière à ce que l’ensemble du pouvoir d’achat soit équivalent à l’ensemble des productions susceptibles d’être vendues, et ceci en fonction de trois paramètres :
a) le potentiel de production
b) les désirs d’achat
c) les conséquences écologiques

4 - L’équilibre des balances commerciales est à prendre en compte car il ne faut ni affaiblir les autres pays qui sont nos clients potentiels, ni s’affaiblir, pour éviter le risque de dépendance.

5 – Le déficit budgétaire est signe que les créations monétaires relatives aux échanges économiques possibles à l’intérieur du pays sont insuffisantes

Faut-il attendre que les responsables inventent de nouveaux paradigmes ?
Non, il faut agir nous-mêmes! Nous essayons, pour notre part, sur le site "societalism "

Pour terminer cette série, je mets la suite en ligne immédiatement "[AJH] 13 - Les démonstrations du paradigme ", auxquels vous pouvez rajouter le premier forum de cette série " [AJH] 1- La Dame de Condé " donc le but était justement de vous montrer la caractéristique principale (et peu connue) de la "fausse monnaie"
1 - la « monnaie « fondante » ou « monnaie franche »
2 - Le "miracle monétaire" de Schwanenkirchen
3 – Le « miracle monétaire » de Wôrgl :
4 - Ithaca
5 – Un « plan Marschall Européen ? »

Cordialement

AJH



Bonjour

Cette page fait suite au forum précédent "[AJH] 12- Épistémologie économique : Changer les paradigmes de l'économie"

Vous trouvez ci dessous cinq titres:
1 - la monnaie "fondante" ou "monnaie franche"
2 - Le "miracle monétaire" de Schwanenkirchen
3 – Le "miracle monétaire" de Wôrgl :
4 - Ithaca
5 – Un "plan Marshall Européen ?"

auxquels il faudrait rajouter le petit apologue du premier forum de cette "série "[AJH] 1- La Dame de Condé dont le but était justement de vous montrer une caractéristique principale (et peu connue) de la monnaie.

Merci d'avoir suivi ces forums.. Vous ont-ils, comme je le souhaitais, apportés "un autre regard sur l'économie et sur l'argent" et permis un tant soit peu de sortir de la "pensée unique" ?
Je pars en vacance quelques semaines, mais je serai content ensuite d'essayer de répondre à vos questions et de poursuivre cette réflexion avec vous sur le thread au choix du gestionnaire de "onnoucachetout".

Cordialement

AJH

13. Les démonstrations du paradigme


1 - la « monnaie « fondante » ou « monnaie franche »

Comment une solution simple a amené à relancer l’économie.
Silvio Gesell, un Belgo-Allemand, avait fait une rapide fortune en Argentine à la fin du XIXe siècle. Revenu au pays, il étudia à fond les problèmes des monnaies, assujetties ou non à perception d’intérêt par leurs émetteurs. Avant la guerre de 14, il conçut son maître livre, L’Ordre Économique Naturel (Ed’Uromant-Bruxelles-1918). Il y posait les bases de la Monnaie Franche qui n’est pas vraiment une monnaie puisqu’il n’y a aucun intérêt à la thésauriser.
Keynes a écrit en 1936 que « le futur apprendrait plus de l’esprit de Gesell que de celui de Marx » (cf. La théorie générale d’emploi, intérêt et Argent, Londres 1936 - réimprimée 1967 - p.355).
Cette monnaie, pour tourner plus vite et fertiliser au mieux le corps économique, perdait 1 % de son montant, à date mensuelle fixe ; perte qu’il fallait compenser par un timbre de 1 % collé sur le dos du billet pour qu’il puisse circuler.
Cette accélération (d’un facteur 4 à un facteur 8... ) était due, selon Fischer, à l’effet psychologique de la perte à éviter (par l’acheteur).
Utilisée 20 fois (dont 3 en France) lors des grandes crises économiques, elle permit des métamorphoses incroyables :
- À Wôrgl (Autriche, 1932-33), elle résorba en 11 mois un chômage au taux de 60 %.
- En 1956, à Lignières-en-Berry (France), elle ressuscita en un an une petite ville ruinée par la désertification des campagnes, comme le relate Science et vie n° 488, et l’utilisation des « bons d’achat » émis par le Maire fut ensuite interdite par De Gaulle.
- Mêmes effets à Marans (France) en 1957-58.
- Et à Porto Alegre (Brésil) en 58.
- En 33-34, aux USA, bien qu’elle ait été utilisée très maladroitement (selon L. Fischer, qui avait étudié de près ses procédures en Europe), elle créa des redressements inespérés dans 14 villes. Le Congrès s’apprêtait à la légaliser quand le projet de « New Deal » de F.D. Roosevelt fit tout stopper.

2 - Le "miracle monétaire" de Schwanenkirchen

En 1919, se forma en Allemagne une association "franchiste" qui avait pour but l'instauration générale d'une "économie franche"... Finalement, un ami du défunt Silvio Gesell, Hans Timm, émit un "billet d'échange" qu'il appela "Wara", mot symbolique composé avec Ware : marchandise et Warung: valeur monétaire. Son organisation s'appela: "Société d'Echanges Commerciaux Wara"

Cette monnaie libre fut émise en valeur nominale de 0.5, 1, 2 et 5 wara et pouvait être acquise par les membres de l'association pour un nombre de marks correspondant. C'est seulement dans des cas d'extrême urgence que la wara devait être reconvertie en marks. Tout adepte de cette doctrine se devait de faire passer l'intérêt de la collectivité avant le sien propre mais avec l'espoir de profiter par la suite des avantages acquis au nom de la collectivité...

L'avantage de l'argent sur la marchandise réside dans le fait que toute marchandise perd de sa valeur avec le temps tandis que l'argent conserve la sienne. D'autre part, les franchistes veulent que l'argent ne soit autre qu'un moyen d'échange qui a pour seule couverture la confiance dans le travail et l'activité du peuple qui s'en sert. En outre, les franchistes sont d'avis qu'une monnaie qui diminue progressivement de valeur circulera beaucoup plus vite et sera ainsi plus productive qu'une monnaie qui soi-disant ne perd pas de sa valeur... mais qui peut être thésaurisée et servir aux spéculations de toutes sortes...

Pour débuter, les franchistes créèrent dans un cercle restreint de leur organisation cette monnaie d'échange... Unité de la wara = un mark. Perte de valeur: 1 % par mois, compensable par le collage d'un timbre. Jusqu'en 1931, la Wara ne retint pas l'attention du grand public...

Schwanenkirchen : 1927-1930

Schwanenkirchen est une petite commune de la forêt bavaroise, une contrée sauvage, isolée, aux communications difficiles et archaïques. Un pays où le matériel "roulant' usagé rend ses derniers services avant sa réforme définitive, où des centaines de villages ne connaissent ni canalisations d'eau ni électricité, où les enfants font des kilomètres à pied en sabots pour aller à une école dont le maître doit s'occuper de sept classes à la fois...

La région est triste: l'exploitation des mines est arrêtée, les carrières abandonnées, les artisans chôment, les commerçants attendent vainement de problématiques clients, les marchands de bestiaux traînent sur des dizaines de kilomètres avec leurs bêtes inhabituées à la marche par un trop long séjour dans les étables, et reviennent des "foires" sans avoir pu réaliser la moindre affaire.

La mine de Schwanenkirchen est abandonnée. Elle avait été exploitée par une société anonyme avec administrateurs, directeur, contremaîtres et tout un appareil bureaucratique complexe. Celle mine qui produisait un charbon de qualité moyenne, avait fait vivre les ouvriers des environs ainsi que les commerçants et était un des facteurs économiques principaux de l'endroit... Or, la société fit faillite et l'exploitation fut abandonnée.

C'est alors que l'ingénieur Hebecker acquit la mine aux enchères dans le secret espoir de l'exploiter à son compte. Hélas ! il ne trouva personne pour financer l'entreprise. Qui aurait voulu investir des capitaux dans une contrée aussi inaccessible.

Ainsi faute d'argent, plus âme qui vive ne descend dans les galeries, les eaux dépassent le fond de 50 mètres, les mineurs vont par de tristes sentiers au bureau du chômage et l'ingénieur habite seul à côté de son puits noyé... Une misère inhumaine règne dans tout le pays.

Schwanenkirchen : 1930-1931

La mine a brusquement repris son activité... Des pompes puissantes aspirent l'épaisse couche de liquide, des scaphandriers descendent la tour d'extraction qui avait été incendiée est reconstruite; à un rythme régulier les ascenseurs montent et descendent et les wagonnets emportent le charbon a la gare à une cadence jamais connue. Le fonctionnaire du bureau de chômage ne voit plus ses soixante habitués... les restaurants sont remplis de consommateurs, les bouchers de Hengersberg vendent tous les samedis leur quintal de viande, les propriétaires des bureaux de tabac entendent avec plaisir la sonnette de leur magasin, les quincailliers font un chiffre d'affaires inaccoutumé, les costumes et les chaussures se vendent comme jamais auparavant... Toute la contrée a pris un aspect de gaîté et d'espoir... Et ceci au moment même où le monde entier subissait les jours sombres de la crise économique générale (la "crise de 29").

Que s'était-il passé?
Voici en quelques mots la clé du mystère:

L'ingénieur Hebecker était franchiste. Voyant les portes de toutes les banques se fermer devant lui, il s'adressa à ses amis franchistes leur demandant la possibilité d'une avance de fonds en leur faisant remarquer que c'était une excellente occasion de propagande pour la société. Ceux-ci comprirent toute l'importance d'une expérience pratique et donnèrent 50000 wara à Hebecker.

Alors une chose stupéfiante commença. Pendant qu'à Berlin et dans toutes les capitales du monde, les ministres s'affairaient vainement sur les problèmes de crise, baisse des prix, économies, chômage, la petite agglomération de la foret bavaroise, Schwanenkimhen, en se rendant indépendante, se soustrayait à la misère mondiale.

Comment cet ingénieur réalisa ce prodige?
lI fit rassembler les mineurs réduits au repos forcé depuis des années et leur annonça que le travail dans la mine pouvait reprendre. Il leur déclara qu'il n'avait pas d'argent pour les payer mais quelque chose qui pouvait en tenir lieu pour peu qu'ils fassent confiance à cette "wara". Les mineurs examinèrent les "billets jaunes" et répliquèrent à l'ingénieur que leur propre confiance avait beaucoup moins d'importance que celle du boulanger, du cordonnier et des commerçants en général... qui devaient leur donner -en échange- des matières comestibles, des vêtements, etc.

Ne rencontrant pas assez de compréhension cher les producteurs et les commerçants de la région, Hebecker organisa alors une cantine alimentée par ses amis franchistes d'Allemagne centrale qui, eux, acceptèrent la "wara" en paiement. Quelques semaines plus tard, l'ingénieur eut la visite des commerçants fort mécontents de ce système qui, d'après leurs doléances, leur enlevait définitivement- toute possibilité de vivre. Ils voulurent avoir de plus amples détails sur ces "billets" et l'assurance de gagner de l'argent en les utilisant. Le patron de la mine leur expliqua que la plus grande partie du salaire de ses ouvriers allait au boulanger, puis de celui-ci au boucher qui les donne à son tour au tailleur, au cordonnier, au forgeron et ainsi de suite... c'est-à-dire que ces billets peuvent -mieux encore que l'argent de l'Etat - rester constamment en circulation. Mieux encore que les billets officiels qui sont thésaurisables. Il leur déclara en outre qu'au cas où d'importantes sommes de wara devraient s'accumuler, les franchistes s'engageraient "exceptionnellement" à les rembourser contre des marks.

A partir de ce moment-là, le "nouveau système monétaire" fonctionna comme une machine bien réglée. Hebecker a remis an route la mine, occupé quarante ouvriers et "revitalisé" l'économie dans trois villages.

Quand après deux ans de chômage consécutifs, les ouvriers touchèrent leur première paie, aucun d'eux n'avait intérêt à garder un seul centime. La totalité de leurs appointements alla aux commerçants pour couvrir les dettes et pour acquérir les denrées de première nécessité. Les commerçants, réticents et sceptiques d'abord, durent se rendre à l'évidence qu'aucune autre monnaie n'étant aux mains des consommateurs, il valait mieux l'accepter que manquer la vente. Ils ne tardèrent pas à remettre leurs "wara" aux grossistes et producteurs ; ces derniers cherchaient à placer le plus rapidement possible leurs billets et s'approvisionnèrent en charbon à la mine Hebecker. Ainsi fut établi le circuit de la "wara" dont une grande partie retournait à la mine pour se transformer en salaire tout en contribuant à améliorer le bien-être général. Quelques mois après, cette petite localité était méconnaissable. Tout le monde avait payé ses dettes et un air de franc optimisme soufflait à travers le pays...

Le succès de cette expérience -au milieu de la crise économique mondiale- se répandit dans toute l'Allemagne. Des reporters venus de tous les horizons pour être témoins oculaires du "miracle de Schwanenkirchen" affluèrent dans le pays. Même les U.S.A. en parlaient dans leurs journaux financiers. Sans toutefois donner la vraie raison du miracle, ils mentionnèrent simplement l'essai d'une monnaie dynamique, inthésaurisable. Il n'est pas douteux que si Hebecker avait tenté de remettre la mine en route avec 40000 D.M., il aurait abouti à un échec certain. L'argent serait passé en une ou deux mains seulement et chacun l’aurait gardé -en réserve- en raison des mauvaises conjonctures économiques...

Pour terminer l'histoire de la "wara", il fàut ajouter que dans toute l'Allemagne, des milliers de commerçants l'acceptèrent et que d'autres communautés comptaient appliquer ce système monétaire. Disons encore que ce mouvement eut une certaine influence en Allemagne :il combattit la politique déflationniste du gouvernement Broning et beaucoup de gens trouvèrent du travail.

Mais le gouvernement se mit à s'occuper de l'affaire sous prétexte que la "wara" était une monnaie et son émission en contravention avec un droit que seul l'Etat possède. Au tribunal, la "wara" gagna le procès. Mais le gouvernement continua son opposition en prétendant qu'elle pouvait conduire à une dangereuse inflation... hélas! le gouvernement ne sut pas faire la distinction entre inflation qui part à zéro pour atteindre des chiffres astronomiques et la modeste "wara" qui part au bord du précipice pour ramener l’économie sur la terre ferme sans pour cela demander une aide extérieure... Finalement, l'arbitraire peut arrêter le bon sens: la wara fut interdite. Le résultat ne se fit point attendre: Schwanenkirchen et les autres villages pour lesquels la wara était "le fluide vital" de la machine économique furent de nouveau réduits au marasme complet...

Un décret du Chancelier Brûning en date du 30 octobre1931, interdit forrnellement en Allemagne l'usage de la wara, de la monnaie timbrée et des bons d'échanges en général... La France ne s'est pas montrée plus libérale que l'Allemagne puisqu'elle interdit le fonctionnement des "Mutuelles d'échanges" que quelques pionniers franchistes avaient instituées dans notre pays...

Pour conclure ce bref exposé, nous allons donner le point de vue des intéressés:

Les commerçants "Nous sommes heureux de perdre 1% par mois du moment que nous pouvons compter régulièrement sur le salaire de quarante ouvriers. Sans la "wara", la mine serait morte, les ouvriers au chômage et notre recette nulle. Une monnaie "timbrée' est préférable à une monnaie fantôme".
Les ouvriers : "Nous ne perdons pas les 1% mensuels, notre salaire va immédiatement dans les magasins d'alimentation où nous n'avons plus aucune difficulté à les placer Nous serions heureux d'avoir beaucoup de "wara", car sans leur institution, nous serions encore dans la misère".
Les franchistes: "La wara cette petite coupure jaune signée par des inconnus- ne contrevient à aucune loi car ce n'est pas une monnaie! La wara n'est qu'un "instrument d'échange" émis par la "S.E.C. Wara". Ce n'est pas de l'argent : la wara n'a pas de couverture et n'est pas remboursable. D'autre part, la wara ne rapporte pas d'intérêt et ne se prête pas à la spéculation...".

3 – Le « miracle monétaire » de Wôrgl :

Voici une analyse détaillée du « miracle monétaire » de Wôrgl.
Dans L’Illustration du 9 septembre 1933, Claude Bourdet terminait en ces termes un article sur la métamorphose de Wôrgl : Wôrgl est devenu aujourd’hui un lieu de pèlerinage pour tous les « économistes libres » du monde entier...
Le 17 février 1934, dans une conférence radiodiffusée par plusieurs radios américaines, le professeur Fisher recommandait Wôrgl comme le meilleur exemple de cette « monnaie datée » qu’il souhaiterait voir introduire partout. Il la déclarait seule capable de combattre la pauvreté et le chômage.
Que s’était-il passé ?
Auparavant, la ville de Schwanenkirchen, dans une situation dramatique due à la crise (1931), avait retrouvé la prospérité en quinze mois. Grâce à la « monnaie franche » de S. Gesell. Celle-ci perdait sa valeur si on n’y apposait pas un timbre de 1 % au 30 de chaque mois. Elle tournait plus vite et permettait plus d’échanges ; car les possesseurs de billets cherchaient à éviter de payer cette « taxe à l’inertie ».
La commune autrichienne de Wôrgl était une petite ville industrielle. En 1932, elle comptait 4300 habitants, dont 1500 étaient chômeurs (60 %).
Les impôts ne rentraient pas et la situation financière de la ville était désastreuse.
Voulant mettre fin à ce marasme, le bourgmestre avait suivi avec intérêt l’expérience de Schwanenkirchen. Pour vaincre les difficultés de trésorerie de son administration, il décida de se servir de la « monnaie franche ».
« L’incitateur » serait la municipalité après accord avec une majorité de citoyens, ouvriers, commerçants, ainsi que la Caisse municipale d’épargne.
L’application pratique fut la suivante : tous les employés municipaux (y compris le maire) toucheraient 50 % de leurs appointements en « monnaie franche » et les nouveaux seraient totalement rétribués avec cette monnaie.
Conformément à ce plan, il fut émis 32.000 schillings le 1er août 1932 en billets de 1, 5 et 10...

Les résultats tangibles
Certains commerçants de Wôrgl, tout comme à Schwanenkirchen, refusèrent au début d’accepter cette monnaie qui avait une trop grande ressemblance avec la monnaie légale ; mais quand ils se rendirent compte de l’intensité de la circulation et constatèrent que les employés et ouvriers municipaux achetaient dans les boutiques qui acceptaient cette monnaie auxiliaire, l’esprit de concurrence reprit bien vite le dessus et ils suivirent l’exemple des autres...
Or, après l’introduction de la « monnaie franche », non seulement les impôts courants furent payés, mais la ville réussit à solder tous ses arriérés, elle put faire exécuter, dans le deuxième semestre 1932, 100.000 schillings de travaux : sept routes neuves, sept km d’asphaltage ; douze nouvelles rues furent projetées... On étendit le système de canalisations. On planta des arbres, on reboisa la forêt... La vie économique prit une intensité incroyable... Et il y eut du travail pour tous !
Les banques profitaient également de cette activité retrouvée.
Au 1er janvier 1933, Wôrgl avait une nouvelle piste de ski (tremplin) et une piscine... Un nouveau pont en ciment armé portait l’inscription : « Construit en 1933 avec de l’argent libre ».
Déjà plusieurs communes voisines allaient être admises par Wôrgl dans le système. C’est alors qu’une plainte contre le maire de Wôrgl fut déposée à la Cour suprême de Vienne... Le Conseil municipal contre-attaqua... en prouvant :
- que la commune avait pu payer tous ses arrérages sur les impôts (120.000 schillings),
- qu’elle avait réussi à exécuter bon nombre de travaux publics de première nécessité,
- que le chômage avait été complètement résorbé,
- que l’économiste américain, le professeur Irving Fisher, de l’Université de Yale, avait envoyé en décembre 1932 une commission pour étudier cette expérience,
- qu’il ne s’agissait que d’une « monnaie auxiliaire » et non d’une monnaie véritable.

Rien n’y fit ! De procès en procès, la Banque d’Autriche plaida l’atteinte à son privilège d’émission par cette monnaie « hérétique » (sic). La commune fut obligée de retirer ces « bons »...
La manière dont le tribunal a débouté Wôrgl de son recours montre qu’elle reconnaissait les effets très positifs de cette expérience, qui avait conduit à une reprise économique rapide, mais qu’elle refusait de la laisser poursuivre, renvoyant de ce fait les citoyens à la misère.

M.B.Issautier (D’une révolution économique et monétaire - 1961) analyse ainsi ces expériences :
Une analyse plus fine de ces expériences de « monnaie fondante » laisse quand même supposer que l’effet économique n’est pas tant dû au fait que cette monnaie présentait cette caractéristique (ce que nous retrouvons dans les périodes de forte inflation), mais au fait qu’elle n’était pas créée par une banque et un mécanisme d’endettement. Il s’agissait donc de « monnaie permanente ».

4 – Ithaca : Article du NOUVEL OBSERVATEUR - Jean-Paul Dubois

Cette ville de l'État de New York a sa propre monnaie et se passe très bien d'un billet vert qui, selon ses habitants, ne sert qu'à enrichir les multinationales.
Vous savez la meilleure ? Ça marche !
Ce que l'on fait? On est au chaud, dans une voiture, et l'on suit un homme qui pédale sur son vélo par une température proche de zéro. Ce que l'on voit? Un casque blanc en polystyrène, le bout d'une barbe rousse et le dos voûté de ce cycliste qui peine sous un voile de pluie et les bouffées du vent. Sa roue arrière remonte une gerbe d'eau qui ruisselle en cascade sur son anorak. On a eu beau insister, tout à l'heure, pour l'emmener dans la berline, il n'a rien voulu entendre : « Je ne conduis pas les automobiles. Et je ne m'assieds pas davantage dedans. C'est ma philosophie. » La scène se passe à Ithaca, État de New York. Dans cette ville, la firme Borg Wagner fabrique, pour le monde entier, les boîtes automatiques des voitures les plus réputées. Mais pour changer de vitesse, Paul Glover vous dira que l'on n'a jamais rien inventé de mieux qu'un bon dérailleur à câble. C'est comme ça. Et il n'y a pas à discuter : "Je n'aime pas ce qui pollue. Je refuse aussi de prendre l'avion. À la rigueur, parfois, quand je n'ai pas le choix, j'emprunte le train. Lorsque, de surcroît, vous apprenez qu'il y a quelques années cet homme a mis six mois pour effectuer à pied la diagonale Boston-San Diego "afin de découvrir à quoi ressemblaient vraiment les tempêtes, les orages, les hommes et les animaux de ce pays", vous pensez avoir affaire à un flâneur fêlé,
Et vous ne pouvez pas vous tromper plus allègrement. Car L'homme qui là, devant nous, trempé jusqu'aux os, mouline dans la tourmente est l'économiste le plus astucieux de l'État, le "banquier alternatif" le plus populaire, le plus zazou, et le plus à gauche que la finance ait jamais connu. Le "New York Times", le "Wall Street Journal", "Associated Press" et même le magazine ultracapitaliste "Across the Board" lui ont consacré de longs articles dithyrambiques.
Cela est d'autant plus surprenant qu'il n'y a sans doute pas au monde quelqu'un qui méprise plus l'argent en général dollar en particulier que Paul Glover. Au point d'inventer et de lancer en 1991, dans sa ville, une nouvelle unité monétaire. Dont il imprime lui-même les billets. Et que la plupart des commerçants, des administrations et même une banque acceptent. A Ithaca, on estime que 2 millions de dollars de cette « monnaie de singe » sont aujourd'hui en circulation. Cette devise locale s'appelle l' "Ithaca hour". Et, consécration suprême, George Dentes, le procureur du comté, a récemment annoncé « qu'il en cuirait aux aigrefins tentés de contrefaire les talbins bigarrés bricolés par Glover puisqu'ils seraient désormais punis aussi sévèrement que s 'ils fabriquaient des faux dollars ». Je dirais que cela devrait être même plus durement sanctionné, ajoute Paul. Car l'Ithaca hour est une monnaie réelle dont la contrepartie représente le travail palpable de gens qui existent, tandis que le dollar est une monnaie de Monopoly des espèces dépecées de toute matérialité, qui n'ont plus d'équivalent or ni même argent, mais seulement celui d'une dette nationale de 5 200 milliards de dollars. En Amérique, le plus grand fabricant de fausse monnaie, c'est l'État .
Ne vous y trompez pas. Ce discours n'est pas celui d'un quelconque milicien antifédéraliste fascisant comme on en rencontre un peu partout dans ce pays. Paul Glover serait plutôt tenant d'un nouvel ordre économique bienveillant, reposant essentiellement sur des marches de proximité, des marques de civilité et des échanges de bons procédés. Évidemment, une telle théorie mérite d'être explicitée. Ancien publicitaire et journaliste, diplômé de gestion municipale, Glover se met en 1991 à observer les mouvements de l'argent dans sa ville. Ce qu'il voit. Les banalités de base du capitalisme : de puissantes compagnies, de grandes chaînes nationales de magasins qui s'installent à Ithaca pour aspirer l'argent local avant de le réinvestir ailleurs.
Glover n'a plus alors qu'une idée en tête. Désamorcer cette pompe à finance, diminuer le débit de ce vorace pipe-line, afin de le remplacer par un système d'irrigation en circuit fermé. Que l'argent tourne, circule, soit, mais sur place, entre soi. C'est alors que lui vient l'idée de l'Ithaca hour, cette unité monétaire que l'on ne pourrait gagner et dépenser que dans la Communauté. En vendant ou en achetant des services et des biens produits localement. Et voilà comment, pour lutter contre le capital, Glover se mit à battre monnaie. Le plus difficile, dans cette histoire, fut bien sûr de convaincre les 30 000 habitants de la ville et les 40 000 étudiants de la toute proche université Cornell que ce papier singulier, qui sur ses deux faces proclamait narquoisement "In Ithaca we trust ", était autre chose qu'une facétie antitrust. Le temps et la nature même de ce séduisant nouveau système d'échange se chargèrent d'instaurer la confiance.
Comment ça marche? Le billet de base, l'Ithaca hour, vaut 10 dollars, ce qui représente en gros le salaire moyen horaire payé dans cette ville, explique Paul Glover. Prenons maintenant un fermier qui vend pour 20 dollars de fromage. À la place de la monnaie nationale, il reçoit donc deux heures de travail gratuit. Avec ce petit capital, il achète par exemple les services d'un menuisier, qui lui-même fait appel au savoir-faire d'un mécanicien, lequel utilise ces heures pour payer son chiropracteur, qui lui se sert de ces billets pour s'offrir quatre places de cinéma, et ainsi de suite. C'est un système sans fin qui grandit de lui-même, une économie écologique, en vase clos, qui s'écarte du dollar et où le temps de travail réel remplaces les liquidités abstraites."
Au début, l'affaire ne tournait que sur une centaine de commerces. Aujourd'hui, ce sont 1 450 boutiques et entreprises qui acceptent cette devise locale, et une revue publiée tous les deux mois remet à jour la liste des participants. À Ithaca, on peut pratiquement tout acheter avec ces coupures. Des dîners en ville, des réparations de toiture, des légumes, du mobilier et même des voitures d'occasion. La mairie et la chambre de commerce ont avalisé la devise, et l'Alternatives Federal Credit Union, une banque des plus officielles, facture certaines de ses charges et quelques frais de crédit en Ithaca hour, « Je ne suis pour rien dans le succès de cette méthode » insiste Glover. « Ce sont les gens de la ville qui ont permis que cela réussisse. Parce qu'ils ont cru en ce système ».
Le plus étonnant, c'est que ce système de troc moderne fait des émules. Vingt-cinq villes, dont Hardwick (Vermont), Waldo (Maine), Santa Fe (Nouveau Mexique) et Kingston (Canada), ont édité, le plus légalement du monde, leur propre monnaie. Et cela grâce aux conseils que Glover dispense sur Internet, mais aussi avec l'aide de son kit de lancement, qu'il vend avec une vidéo pour 40 dollars.
Une banlieue de Mexico tente, elle aussi, l'aventure, et le jour de notre arrivée, sur son vélo, notre hôte filait à un rendez-vous que lui avaient fixé des émissaires zapatistes désireux de s'informer sur cette nouvelle forme d'économie. "Ils cherchent un moyen de rendre financièrement viable leur révolution, de sortir des circuits classiques de L'argent, dit Glover. Vous savez, cette forme de troc est très intéressante pour des pays pauvres, et j'ai eu plusieurs contacts avec des États africains."
En attendant, à Ithaca, on peaufine le système.
La librairie Autumn Leaves est un peu la banque centrale du système. (C'est ici que l'on vient changer ses dollars en Ithaca hours, jamais l'inverse).
"Pas de spéculation, pas d'inflation, observent Stephany Marx, le gérant. Nous émettons de nouveaux billets quand cela est nécessaire, a mesure que l'organisation grandit. Et, comme toutes les banques, nous remplaçons les coupures endommagées. Pour faire basculer les derniers sceptiques, voici un florilège des appréciations que les habitants de la ville portent sur leur monnaie. Michael, graphiste : "Les Ithaca hours sont la meilleure chose qui soit arrivée dans notre cité depuis l'invention du pain en tranche." Joe, marchand de disques: "Cela reflète notre philosophie, stimule notre agriculture, notre artisanat, et responsabilise nos vies." Danny, électricien : "Notre argent reste ici et nous nous entraidons, plutôt que d'enrichir des multinationales." Dave, professeur d'économie : Cette organisation parallèle crée un lien de solidarité et donne notamment la possibilité à des chômeurs de trouver un emploi." Eli, rabbin : 'Les "heures" sont une manière de rendre l'économie humaine, d'y ajouter une note chaleureuse et fraternelle." Charlie, fabricant de tambours: "Cette forme de troc nous permet, à ma femme et à moi, de manger plus souvent au restaurant." Bill et Cris, marchands de légumes: "Grâce à cet argent local, davantage de gens achètent des produits du terroir. Cela a fait augmenter nos ventes, et nous nous offrons désormais des petits luxes que nous n'aurions jamais pu nous payer en dollars. " Voilà succinctement résumée l’œuvre magique de Paul Glover, ce cycliste activiste aimé des zapatistes et célébré par la presse capitaliste. Le jour de notre départ, à l'aéroport, des vols ont été annulés é cause de la force des bourrasques. En nous tendant une main amicale, Glover dit : "Vous avez de la chance. Pour un mois de novembre, il fait plutôt doux. Puis il enfourche sa bécane, ficelle son casque sous son menton, toise les frimas, et tel un courant d'air disparaît dans le vent.

5 – Qu’est ce qui empêche un « plan Marshall Européen ? »

Voir un article http://www.societalism.org/docs/marshall_europeen.pdf : Éradiquer la pauvreté en Europe et dans les PVD. La nécessité d'un « plan Marshall » européen.
(Proposition retenue au "Congrès Européen Citoyen" - Liège 22 et 23 septembre 2001 )

...dont la conclusion est la suivante:

si un gouvernement peut émettre des « bons du Trésor » ou des obligations d’État, il peut émettre des crédits sans intérêt. Les deux sont des promesses de payer, mais l'un plombe les prix, et l'autre aiderait les populations. C'est une situation terrible lorsque le gouvernement, pour augmenter la richesse nationale, doit s'endetter et se soumettre à payer des intérêts ruineux à des structures privées qui contrôlent la valeur fictive de la monnaie. Dans un système où la monnaie est crée par le système bancaire privé, avec intérêt, chaque fois que nous voulons augmenter la richesse nationale d’un pays, nous sommes forcés d’accepter une augmentation de sa dette.

Un Plan Marshall Européen à destination des PVD et de l'Europe elle-même "est possible" et cela ne nous appauvrirait en rien, au contraire puisqu'il permettrait de développer une production écologiquement orientée en créant des emplois. C'est maintenant aux techniciens de la monnaie et aux économistes de proposer un "schéma pratique". Mais il est évident qu'il ne sert à rien d'un coté d'aider ces pays pauvres par une action telle que celle ci tout en les étranglant d'un autre en leur réclamant une dette et les intérêts qu'ils ne peuvent payer sans des sacrifices que nous n'oserions surement pas demander à nos propres populations.